ancres flottantes, parachutes...
publié le 03 Juin 2003 20:55
Commentaires suite aux derniers échanges et articles sur
les ancres flottantes, parachutes, etc...
D'abord un point de vocabulaire : tout le monde
n'utilise pas les mêmes mots pour parler des mêmes
choses. J'ai choisi d'utiliser le même vocabulaire que
dans le Coles en espérant que ça deviendrait un
standard. Voici donc mon glossaire (libre à vous de
l'adopter...) :
- engins de traîne : tout les engins décrits ci-dessous...
- ancre parachute : se dispose à l'avant du bateau et a
la forme... d'un parachute! Utilisée pour arrêter le
bateau, elle est donc très grande (par ex 5,50 m de
diamètre pour un 12 mètres).
- ancre flottante : utilisée sur l'arrière du navire
pour le ralentir. Il existe un grand nombre de
dispositifs différents : ancres simples (1,80 m de
diamètre pour une delta destinée à un 12 mètres)
dessinées pour être stables (= surtout ne pas se
retourner), ancres rigides parfois munies de clapets
conçues pour rentrer en action à partir d'une certaine
vitesse, et ancres séries (type Jordan) constituées de
plein de petits cones mis les uns derrière les autres.
- trainards : les aussières et tout ce qu'on balance
derrière le bateau quand on veut ralentir et qu'on a
rien d'autre de disponible.
Des images seraient utiles pour bien visualiser tout
ça... En tous cas les "cones" simples (genre manche à
air) qu'on voit quelquefois sont des engins parfaitement
désuets et inefficaces, donc on les oublie.
Ancre flottante ou parachute ?
L'ancre parachute arrête le bateau face à la vague. La
dérive est très faible -hors courant- entre 0,5 et 1,5
noeuds. Le parachute et le bateau suivent bien sûr le
mouvement cyclique d'un bouchon dans une vague, il faut
essayer de mettre une longueur d'aussière telle que les
2 soient en phase mais ce n'est pas toujours possible.
C'est pourquoi il est indispensable d'utiliser une
aussière très élastique pour éviter les chocs trop
brutaux. Pour ma part je fais faire une fabrication
spéciale en polyamide par la Corderie Lancelin. Pour
répondre à une question souvent posée les mouvements de
recul sont très modérés car l'aussière est toujours sous
tension : il est bien plus urgent de renforcer vos bites
d'ammarrage que votre gouvernail! L'ancre parachute est
presque toujours une bonne solution à adopter, à moins
que le courant porte à la côte. Par contre il faut mieux
anticiper car sa mise en oeuvre dans le très gros temps
est délicate, même si les "sacs de déploiement" qui
existent maintenant facilitent largement les choses. Les
mouvements du bateau sous ancre parachute vont de très
doux ("on dirait que la tempête s'est calmée") à dur
selon les bateaux et les conditions de mer. Les brides
arrangent bien les choses et de façon générale on peut
bien améliorer la situation en faisant des essais par
temps maniable. Le bateau présente sa partie la mieux
protégée, l'étrave.
Avec les ancres flottantes le navire reste en mouvement
: le but est de fuir doucement devant la mer sans être
roulé, ni sancir. Les modèles existants cherchent donc à
répondre au cahier des charges suivants :
- exercer une résistance suffisante pour ralentir le bateau
- agir de façon continue pour éviter les accélérations
brusques avec risque de sancir (cas de l'ancre qui sort
de l'eau ou s'emmèle)
- agir peu à faible vitesse pour éviter que le bateau
reçoive les déferlantes de plein fouet ou ne se mette en
travers
Je discuterai après les avantages et inconvénients des
différents modèles sur le marché. L'avantage des ancres
flottantes est évident quand le vent souffle dans le bon
sens : on progresse. De plus cette attitude est plus
confortables sur certains bateaux avec des mouvements
moins violents. Du côté des inconvénients on trouve
évidemmennt le cas d'une côte sous le vent, les chocs
des déferlantes sur la poupe - partie du bateau mal
protégée -, et le risque de sancir si une accélération
exceptionnelle emmène quand même le bateau.
Je mets ci-dessous un extrait de mon site pour illustrer
les différences d'usage entre ancres flottantes et
parachutes :
"Nous ne citons pas de forces de vent parce que la
notion de "gros temps" dépend du bateau. Il peut
commencer à force 8 ou moins pour une petite
embarcation, ou seulement à 9-10 pour un croiseur
hauturier de 15 m.
bateau en avarie et côte sous le vent : c'est l'exemple
typique où l'ancre-parachute est irremplaçable. Sauf par
temps très calme une ancre classique est inutilisable,
soit que le fond soit trop loin, soit que les effort
soient trop brutaux pour le matériel. Bien sûr
l'ancre-parachute n'empêche pas totalement la dérive due
au vent, et pas du tout celle due au courant ; mais elle
donne un temps très appréciable pour réparer ou attendre
les secours. En plus, en stabilisant le bateau elle
facilite d'éventuels travaux de réparation et améliore
la sécurité (ceux qui ont eu l'occasion de se déplacer
sur un bateau désemparé au large apprécieront).
Notez cependant que dans le cas où un port serait
accessible sous le vent, il serait possible d'utiliser
un traînard pour s'y diriger. On peut envisager
d'orienter le bateau à 45° de chaque côté du vent arrière.
gros temps avec de l'eau à courir : si tout va bien, que
l'équipage est nombreux et frais, le bateau en parfait
état et le gros temps... pas trop gros vous n'aurez sans
doute besoin de rien (sauf du spi de brise ?...). Sinon
dans ce cas l'ancre flottante a l'avantage de rendre le
bateau plus stable, plus facile à maîtriser. Elle est
facile à mettre en place et à récupérer. Si le vent vous
pousse dans la bonne direction, c'est la bonne solution
! Dans le cas contraire vous préférerez peut-être vous
en remettre à une ancre-parachute, plutôt que de vous
battre au près ou de perdre du terrain.
très gros temps : on est là dans un domaine où il y a
bien peu de certitudes. Chacun devra évaluer les atouts
de chaque solution en fonction de la situation du
moment, du bateau, de l'équipage... On peut cependant
dire de façon générale que l'ancre-parachute donne plus
de sécurité (sans doute le maximum possible). En effet
avec elle le navire expose sa partie la mieux protégée
(l'étrave), il bénéficie aussi d'une certaine protection
par le parachute lui-même, qui casse les vagues, et
cependant la souplesse du système l'autorise à "céder" à
la lame. Il est dans cette position le moins exposé à
sancir ou chavirer. Enfin l'équipage n'a pas besoin
d'intervenir sur le pont, sinon pour vérifier l'usure de
l'aussière."
Choix d'une ancre parachute : on utilisait autrefois des
parachutes réformés, maintenant les différents modèles
sur le marché sont assez proches, d'autant que le
différents fabricants ont eu l'intelligence (comme pour
les ancres flottantes) de mettre leur expérience en
commun. En France seul Paratech est représenté à ma
connaissance...
Choix d'une ancre flottante : Le choix est plus vaste.
En gros il y a les souples simples (delta Paratech), les
souples série (Jordan) et les rigides (Seabrake).
Comparons selon différents critères :
- commodité d'usage : les rigides sont très
encombrantes, les "série" le sont moins, et les souples
encore moins puisque l'aussière peut servir à d'autres
usages.
- prix : les "série" sont chères mais peuvent être
faites "maison" avec (beaucoup) de patience, les rigides
sont chères aussi et les souples nettement moins.
- lutte contre le risque de sancir : les "série" sont
sans doute les plus efficaces, leur grande force (à
condition d'être bien lestées) est que si une partie de
l'aussière sort de l'eau, le reste continue à agir. Les
deux autres modèles doivent de préférence être réglés en
fonction de la longueur d'onde des vagues. On peut aussi
utiliser deux ancres "souples" à des longueurs
différentes pour une sécurité maximum.
- vulnérabilité de la poupe : c'est un point faible des
"série", dont Jordan était d'ailleurs conscient, et qui
est la contrepartie de leur efficacité. Elles risquent
d'exposer la poupe aux déferlantes avec une faible
vitesse d'avancement. Au contraire les ancres simples
sont conçues pour opposer une résistance faible aux
basses vitesses.
La question des expériences "vécues" : Il y a plus de
120 exemples documentés dans le livre DDDB (en
anglais-ce livre est un travail collectif remarquable),
avec en plus plein de réflexions intelligentes sur les
tactiques de gros temps (et les indications pour
construire une ancre Jordan..), sinon la dernière
version du Coles donne plusieurs exemples d'utilisation
des engins de traîne.
Salut Nicolas,
Juste un truc qui me chiffonne : une remorque avec trop d'élasticité, va se tendre (se tendre...), puis atteindre un point de
retour. La force de rappel (qui peut être énorme) devient plus importante que les actions vents/vague (surtout dans un moment
de calme), et là, rezou : "en avant toute !" . Le bateau se fait rappeler en avant, il avance, les forces s'équilibrent, et pendant
qq 10 aines de secondes, la remorque devient complètement inefficasse (elle a mollie, et doit se retendre pour servir à qq
chose).
Ce yoyo me fait dire que question élésticité, point trop n'en faut, surtout sur un longueur de 200 ou 300 metres (la longueur
d'extension doit être énorme). A l'extrème, trop d'élasticité devient dangereux. Tt de même, ce serait dommage de se le
prendre ds la G...
J'aimerais bien avoir ton avis. Moi aussi j'ai un para de 5M2.
Toutime
Salut Toutime..
Tu touches là le point sensible de (pratiquement) tous ces systèmes.. il n'est pas posible de parfaitement synchroniser la
position de l'ancre flottante et en même temps du bateau par rapport aux différentes crètes de vagues.. et donc, de façon
inévitable, il y aura des moments où l'aussière de liaison sera parfaitement tendue.. et d'autres où elle sera molle.. et c'est bien
là tout le problème.. lorsque l'aussière se retend, ce sont de violents coups de boutoir, qui se produisent et il y a intérêt à ce
que les taquets de fixation soient HYPER résitants..
Et c'est là, à mon avis, le gros avantage du traînard de Jordan (voir le dossier spécial que j'ai écrit à ce sujet sur STW..)
Composé (pour la taille de mon bateau) de 150 petits cônes.. il y en a toujours un bon nombre qui sont dans l'eau et qui jouent
leur rôle de frein.. et donc, l'aussière n'est jamais détendue et aussi en conséquence on élimine ces violents coups de rappel,
présents avec les autres dispositifs...
Lorsque j'ai eu à choisir un dispositif d'ancre flottante pour mon bateau, c'est sans hésiter le traînard de Jordan que j'ai choisi..
www.jordanseriesdrogue.com
http://www.au-vieux-campeur.fr/gp/asp/produit.asp?codprd=47644
Bonjour à tous,
D'abord toujours faire la distinction entre ancre parachute et flottante. C'est bien de parachute dont parle Toutime.
Le bateau au bout de son parachute est soumis à 2 forces : le vent et les vagues. Pour simplifier disons qu'ils viennent de
la même direction. L'ancre parachute, elle, est soumise seulement au mouvement des vagues (mouvement de rotation comme
chacun sait).
C'est pour ça qu'il faut essayer de synchroniser le mouvement de l'ancre et du bateau en réglant la longueur de cablot.
J'admets d'ailleurs que c'est plus facile à dire devant son clavier qu'à faire en situation réelle.
Imaginons (essayons en tous cas...) deux vagues de suite de 9 mètres de hauteur, exceptionnelles en atlantique nord : le
bateau et le parachute décrivent un cercle de 18 m de diamètre, donc au pire si leur, mouvement est complètement décalé ils
vont être éloignés de 18 mètres par la vague. Ils sont reliés par un cablot de 110 m en polyamide dont l'allongement maxi
est 20 %, donc 22m.
Voyons ce qui se passe :
- cas favorable - mouvement synchrone : la seule force qui s'exerce en réalité sur le bateau par rapport à l'ancre est le
vent, qui s'exerce de façon assez régulière donc pas de problème.
- cas très défavorable - mouvement contrarié de l'ancre et du bateau : en partant d'une position équilibrée, cablot allongé
de 5 m sous l'effet du vent, chacun part de son côté pour s'éloigner de 18 m, en réalité moins puisque bien sûr sous l'effet
de cette traction le bateau avance par rapport à l'eau. Quel est l'allongement quand on arrive au point extrème où ancre et
bateau sont en opposition ? Il sera forcément inférieur à 23 mètres (18 + 5) donc on est à la limite du domaine
d'élasticité. Forcément supérieur à 5 mètres car la force de rappel ne peut pas entrainer un mouvement supérieur au rappel
lui-même. Disons 15 mètres...
Maintenant ancre et parachute se rapprochent de 18 mètres mais le vent continue à agir. Il devrait rester entre 0 et 2 m
d'allongement au moment du retour à l'équilibre.
Malgré toutes les approximations on voit que dans le cas très défavorable le risque existe de se retrouver avec l'aussière
détendue mais de toutes façons très peu de temps. En tous cas (et là je suis plus affirmatif) il n'y a pas d'inconvénient
lié à l'élasticité, au contraire.
La réponse d'Alain porte sur les trainards, c'est un cas de figure différent. De toutes façons les trainards (dont les
ancres flottantes) ne nécessitent pas spécialement de cablot élastique car leur taille par rapport au bateau fait qu'ils
n'ont aucune chance de l'arrêter, ils ne font que le freiner. Les efforts sont beaucoup moins importants qu'avec un
parachute. Le problème est celui de l'efficacité.
J'ai déjà été long, j'arrête là.
Nicolas
"les trainards (dont les ancres flottantes) ne nécessitent pas spécialement de cablot élastique car leur taille par rapport au
bateau fait qu'ils n'ont aucune chance de l'arrêter, ils ne font que le freiner. Les efforts sont beaucoup moins importants qu'avec
un parachute. Le problème est celui de l'efficacité. "
Nicolas,
Tu as sans doute raison concernant les traînards en général.. mais en ce qui concerne le "Jordan", tu n'as pas moins de 75
mètres d'aussières derrière le bateau et environ 150 petits cônes.. dont la surface totale est nettement supérieure à celle du
parachute de l'ancre flottante.. Et par conséquent, son efficacité sera au moins égale à celle de l'ancre parachute..
En effet, il n'est pas, dans ce cas, nécessaire d'avoir de l'élasticité, justement parce qu'avec le "Jordan" on n'a pas ce gros
problème d'à-coups violents qu'on a avec les autres ancres flottantes..
Alain,
150 cones de 13 cm de diamètre font 2 m² d'ouverture. Pour un bateau de 11 m on utilise un parachute de 4,57 m de diamètre
soit 16,4 m². Pas trop comparable quand même. Et heureusement car si tu avais une telle surface au cul de ton bateau il
serait arrêté et la poupe n'est pas vraiment prévue pour encaisser ces chocs.
Si tu compares à l'ancre flottante qui sera utilisée sur un bateau de 11 m sa surface exposée est par contre de 1,2 m² donc
comparable au trainard de Jordan qui a nécessairement une partie de ses cones en dehors de l'eau, de plus chaque cone est
dans la trainée du précédent. Pour les trainards c'est la géométrie qui est aussi très importante. Celle des ancres Delta de
Paratech est étudiée pour exercer une traction faible à faible vitesse qui augmente beaucoup quand le bateau accélère car
c'est bien ce qui est important : ne pas arrêter le bateau mais l'empêcher de partir en survitesse. Noter aussi pour le
problème de la synchronisation avec les vagues que rien n'empêche d'utiliser 2 ancres delta avec des longueurs de cablot
différentes.
Ceci dit je n'ai rien contre les trainards de Jordan, c'est une solution intéressante pour ceux qui savent faire et ont du
temps. En l'état je pense que ce ne sera jamais commercialisé car ce serait hors de prix vue la main d'oeuvre nécessaire.
Cordialement
Nicolas
Plûtot une question...
Comment cela marche avec un Catamaran?
Merci
Bernard
Tous ces textes font froid dans le dos! l Merci de les écrire.
Conseillez-vous de posséder un ou plusieurs de ces dispositifs quand on navigue à la "belle saison" 4 à 5 mois en
Méditerrannée? Je n'ai pour l'heure jamais connu de mer si dure dans ce secteur pouvant justifier la mise en oeuvre d'un tel
appareillage.
Bonjour,
Je ne connais pas le Seasquid. D'après ta description il doit ressembler au Seabrake, en plus simple vu le prix. Apparemment le principal
inconvénient serait l'encombrement dans les coffres.
Concernant la nécessité ou non d'embarquer des engins de traîne pour des navigations en méditerranée... c'est à chacun de voir. Il y a des
milliers de bateaux qui naviguent sans et à qui ça ne manque pas, d'autres qui en ont à bord et ne s'en serviront jamais. Reste le cas des
quelques uns qui regretteront un jour de ne pas en avoir et des autres qui se féliciteront de l'avoir !
Bien cordialement
Nicolas
Une question n'a pas reçu de réponse : comment fait-on avec un cata? Est-il conseillé de gréer la patte d'oie sur le câblot ou
non? D'autre part j'ai lu sur un forum qu'un Nautitech 47 était passé sur le toit au moment de gréer son ancre parachute,
quelqu'un en sait-il plus?
Sur les catas il est impératif de gréer l'ancre parachute sur une patte d'oie. Je ne connais pas le cas du Nautitech 47 mais
il y a eu un accident il y a quelques années avec un lagoon. Les causes du chavirages ne sont pas clairement connues mais en
tous cas l'ancre n'était pas sur une patte d'oie.
Nicolas : une petite remarque concernant votre raisonnement plus haut concernant une configuration par vagues de 9m. Le
parachute et le bateau décrivent des cercles de 9m et non pas de 18, ce qui crée effectivement un écart maxi de 18m dans le
pire des cas...