Bastia - Marseille 29 Octobre - 16 Novembre
Notre séjour à Bastia va durer 10 jours. A notre arrivée, le dimanche 29 Octobre, un des deux ventilateurs de la cale moteur donnait des signes de faiblesse. Nous avons donc décidé de changer les deux ventilateurs avant d’aborder la dernière traversée vers le Continent. Les spécificités des moteurs, leur emplacement, et les diamètres des tuyaux de conduite d’air nous ont contraints à effectuer un remplacement à l’identique. Cela impliquait donc une commande spécifique chez le fournisseur Plastimo, par l’intermédiaire des Chantiers Navals de Bastia et un envoi en Chronopost ; mais avec le 1° Novembre, férié, et les dysfonctionnements du service public de transport rapide des colis, nous avons pu récupérer nos ventilateurs le lundi 6 Novembre, soit une semaine plus tard !
Entre temps, nous avons mis à profit ce séjour prolongé pour visiter Bastia, que nous n’avions jamais visité ; nous avons ainsi parcouru la place Saint Nicolas, avec ses grands immeubles faisant penser à la Riviera, sa statue de Napoléon en empereur romain, avec les attributs de Jupiter, sceptre et aigle ;
les rues de Terra Vecchia, avec les oratoires de la Confrérie Saint Roch et de la Confrérie de l’Immaculée-Conception : ces deux chapelles sont richement décorées de tableaux, de statues de procession, de boiseries travaillées, elles sont tendues de damas rouge, les buffets d’orgues sont très ouvragés aussi ;
plus loin, l’Eglise Saint Jean-Baptiste : c’est une des plus vastes églises de Corse, remarquable de loin par ses deux hauts campaniles ; on y accède par une porte latérale, et on découvre une nef monumentale avec un maître autel en marquèterie de marbres polychromes, surmonté d’un tabernacle en argent remarquable par sa taille ; le buffet d’orgues est lui aussi impressionnant.
Mais il est surprenant qu’une église aussi imposante, au-dessus du Vieux Port, ne possède pas un parvis qui lui corresponde. Son entrée principale donne sur une petite rue, et seul un petit escalier lui donne un accès indirect sur le port ! Nous l’empruntons pour poursuivre notre visite par le tour du Vieux-Port avec ses immeubles contrastés, ses bateaux toujours en mouvement du fait de la houle ;
nous atteignons l’escalier Romieu qui nous permet de rejoindre la Citadelle, le palais des Gouverneurs génois, et ses petites ruelles (nous sommes dans le quartier de Terra Nova). La chapelle du Crucifix des Miracles abrite un Christ Noir, trouvé en mer par deux pêcheurs bastiais en 1428 ; cette chapelle abrite aussi les dépouilles veillées avant les obsèques et ainsi les possibilités de visite sont restreintes. Dans la cathédrale Sainte Marie, un groupe en argent massif représentant l’Assomption de la Vierge Marie, pèse près d’une demi tonne, et est sorti en procession tous les 15 Août. Au cours de cette promenade dans la citadelle nous avons remarqué un grand nombre de bâtiments religieux (séminaire, Palais Episcopal, couvents), confisqués lors de la Révolution, transformés en caserne ou prison, abandonnés aujourd’hui ou occupés par des particuliers. Heureusement, les panneaux explicatifs qui jalonnent notre promenade permettent de mesurer la grandeur passée de Bastia.
Le 1° Novembre, nous avons rechaussé nos chaussures de marche pour grimper au-dessus de Port Toga, le long d’un ancien sentier muletier en balcon sur les hauteurs de Bastia, vers le hameau traditionnel d’Alzeto, avec ses fours, ses lavoirs, ses toits de lauze ; nous n’avons malheureusement pas pu, par manque de temps, poursuivre la balade le long du sentier des glacières, qui fournissaient en glace la ville de Bastia et son hôpital. Mais ce passage à travers le maquis nous a permis d’apprécier la situation de Bastia et des hameaux qui le surplombent, les Iles Toscanes au large, au soleil déclinant ;
les chênes liège ont jalonné ce sentier creusé par le passage des villageoises qui descendaient au marché de Bastia vendre leur production, et consolidé par des murs de pierres sèches.
Ce séjour prolongé à Bastia nous a permis aussi de revoir nos amis Maurice et Monique ; nous sommes allés les retrouver, en voiture, dans la montagne au pied du Monte Cinto, savourant ces paysages rudes mais si beaux, sous les couleurs d’automne, notamment dans les gorges de la Scala Santa Regina…
Enfin, c’est en train que nous avons traversé la montagne corse en passant par Ponte Lecchia, Corte, Vizzavone, pour rejoindre notre ami José à Ajaccio. Il avait fait le déplacement jusqu’à Porto Pollo, au mois de Juillet, pour un dîner au mouillage sur Nissos ; cette fois, c’est nous qui avons fait le déplacement, savourant à chaque virage de la voie ferrée les beautés de cette montagne en automne.
A force d’attendre nos ventilateurs de cale, le mauvais temps a fini par s’installer, et nous avons accueilli après les averses du dimanche 5 Novembre, nos fils Maël et Etienne. Le premier, lieutenant sur le Paglia Orba, est venu nous saluer avant de reprendre son quart ; le second, en vacances, nous a rejoints pour naviguer avec nous une semaine. Avec lui, nous avons donc pu changer un ventilateur de cale défectueux, mais nous n’avons pas pu changer le deuxième car le moteur livré était en court-circuit et faisait sauter le disjoncteur ! En accord avec le chantier, nous avons demandé au fournisseur, la livraison d’un neuf, à notre adresse à Marseille.
Le temps étant à la pluie et au vent, nous avons pris le temps de visiter à nouveau Bastia, entre deux averses, avec Etienne ; nous sommes également montés jusqu’à l’oratoire de Monserato, tout en surveillant les nuages arrivant des Iles Toscanes vers Bastia ! A notre arrivée à la chapelle, un jeune garçon chantait en langue corse en s’accompagnant de sa guitare ; sa belle voix se déployait dans l’acoustique pure de cette chapelle et c’est avec émotion que nous en avons franchi le seuil. A la place du chœur, un escalier raide tendu de velours rouge et couvert de bois doré s’élève jusqu’à l’autel placé à son sommet : c’est l’« Escalier Saint » « Scala Santa », privilège que les bastiais ont obtenue du pape Pie VII, en remerciement de l’accueil chaleureux qu’ils avaient réservé aux prélats romains exilés à Bastia pour s’être opposés à Napoléon. Les pénitents le gravissent à genoux pour obtenir l’absolution de leurs péchés ; deux escaliers en arrondi de chaque côté, plus simples permettent la redescente des pardonnés.
Mercredi 8 novembre, une fenêtre météo semble se profiler et nous appareillons pour gagner le continent. Les couleurs de la côte ont encore une fois retenu nos regards : les verts du maquis, le gris-vert des roches, le bleu de la mer…
Après une remontée du Cap Corse assez calme, au moteur, nous avons mis le cap vers les îles de Lérins ; un rouge-queue est venu se reposer quelques minutes sur notre arrière avant de reprendre sa route.
Notre traversée a été relativement difficile avec une grosse houle qui subsistait des coups de vent de la veille, et un vent très irrégulier, sous les nuages d’orage. Les manœuvres de prises de ris, de renvoi des voiles, se sont succédées à une rythme rapide, et finalement, c’est au moteur que nous avons franchi les milles restants, chahutés par la houle, et surveillant les éclairs. Au petit matin nous étions en vue du monastère fortifié de l’île Saint Honorat, et avons pu savourer notre petit déjeuner, bien amarrés au Vieux-Port de Cannes, jeudi 9 Novembre.
Nous avons mis à profit le calme de la journée de vendredi 10 Novembre pour avancer de quelques milles sur notre route retour, en longeant la côte de l’Estérel. Une amie d’Etienne nous a rejoints et nous lui montrons la beauté des couleurs de cette côte, rehaussées par le ciel parfaitement dégagé, alors qu’au loin les Alpes maritimes sont recouvertes de neige.
Nous mouillons dans la baie d’Agay pour le déjeuner et nous terminons notre route le long de l’île d’Or, des Lions de Terre et de Mer devant Saint Raphaël, jusqu’à Port Fréjus, où nous sommes très bien accueillis, dans un port très bien entretenu. Nous sommes placés entre deux grands yachts à moteur dont les hautes structures nous privent du soleil, mais nous sommes bien dans l’axe du vent attendu pour ce week-end du 11 Novembre… Nous utilisons une fois de plus nos amarres sur tendeurs.
Pendant ce coup de vent, c’est notre fils Damien que nous retrouvons, accompagné de deux amis, l’un breton, et l’autre normande. La luminosité des jours de coup de vent les a conquis, et nous avons parcouru avec eux les rues et les quais de Saint Tropez.
Le froid est arrivé avec ces coups de vent, mais nous prendrons le temps, mardi 14 Novembre de visiter Fréjus : le port moderne a été créé le long de la côte, à l’extrémité d’un canal le reliant à la vieille ville provençale, rappelant ainsi qu’un port romain était situé au pied du promontoire où elle se situe. Fondée par Jules César, et agrandie par Octave-Auguste, la ville a abrité les galères qu’Octave avait prises à son rival Antoine et à sa compagne Cléopâtre, lors de la bataille d’Actium (en 31 av.J.C.). Après notre passage sur les lieux de la bataille en Grèce (Prévezza, Cap Aktion), « la boucle est bouclée »… Les ruines de l’amphithéâtre, réhabilitées avec du béton sont un peu décevantes ;
en revanche, la ville provençale avec son groupe épiscopal a retenu notre attention. Ce groupe épiscopal comprend la cathédrale Saint Léonce reconstruite et agrandie à plusieurs reprises depuis le V° siècle, formée de deux nefs, l’une de l’ancienne église paroissiale Saint Etienne, et l’autre de l’Eglise Notre-Dame, le baptistère paléochrétien, et le cloître du XIII° siècle, qui servait de passage aux fidèles, et qui est remarquable par les « ais d’entrevous » (planches placées entre deux solives du plancher) de son plafond, qui sont peints de scènes de la vie quotidienne et d’un bestiaire fantastique.
Nous profiterons de la « douceur » de l’après-midi pour changer le deuxième ventilateur de cale que Damien nous a apporté de Marseille. Malheureusement, le même dysfonctionnement électrique que le précédent nous a fait garder, une fois de plus, l’ancien ventilateur qui, lui, heureusement, fonctionne toujours…
Mercredi 15 Novembre, le vent s’est calmé, la houle doit s’amortir, et les deux jours à venir devraient ne pas être trop ventés, nous appareillons donc au matin à destination de Porquerolles. Les nuits sont trop froides maintenant et nous préférons faire une étape sur cette île. Nous ne serons pas déçus par l’escale, arrivés vers 16 h, nous avons pu savourer la douceur du village dans le calme de l’automne.
Jeudi matin nous appareillons au lever du jour, savourant encore une fois le lever du soleil,
et parcourons au moteur, avec un vent faible, les quelques 50 milles nous séparant de notre port d’attache. Après les îles vertes de Croatie et de Grèce et même du Levant, nous avons retrouvé nos îles minérales marseillaises.
Entre Maïre et Tiboulen, la Bonne Mère nous a accueillis, comme d’habitude,
et nous avons pris nos amarres sous son regard à 15 h 40, clôturant ce périple méditerranéen de quatre mois et demi, incomplet, mais si riche !
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