Séjour à Mindelo 18 – 28 novembre 2018

Séjour à Mindelo 18 – 28 novembre 2018

Posté par : Dominique
22 Décembre 2018 à 00h
Dernière mise à jour 25 Décembre 2018 à 19h
5050 vues
Flux-RSS

Notre séjour dans les îles du Cap Vert s’est donc limité à l’île de São Vicente, découverte le 22 janvier 1462, jour de la Saint Vincent, pour le compte de la couronne portugaise par le navigateur Diogo Alfonso ; sa statue veille sur la rade au bout de la plage des barques.

Durant la première partie de notre épisode capverdien, nous sommes restés au mouillage du 18 au 21 novembre. Notre arrivée au petit matin du dimanche ne nous a pas permis de faire les formalités d’entrée dans le pays, et nous sommes restés à bord, découvrant de loin cette rade et cette ville : des épaves, des barques de pêcheurs, des voiliers, nombreux, au mouillage et une forêt de mâts dans la marina où nous reconnaissons les pavillons du Rallye des Iles du Soleil qui nous ont devancés depuis La Palma. Des voiliers arborant les couleurs du Rallye de l’Arc arrivent régulièrement.

Nous sommes mouillés devant un Amel 54, et les propriétaires passent nous saluer en début d’après-midi ; la discussion nous fait vite comprendre que la famille qui est à son bord participe aux JMJ à la voile, en compagnie de deux autres voiliers, mouillés eux-aussi dans la rade. Leur objectif est de rallier Panama pour les JMJ qui auront lieu en janvier, depuis la France, via l’Espagne, le Portugal, le Sénégal les îles du Cap Vert, la Martinique… A bord du Amel « Estran », une famille belge Oscar, Philippine et leurs trois jeunes enfants, et deux jeunes pèlerins des JMJ. (A bord d’Exultet, 12 jeunes et le skipper ; à bord de Kêr Maï, 8 ou 9 jeunes et le skipper). Ils nous invitent à participer à la messe qui sera célébrée sur leur bord demain, lundi, à 8h30, par leur aumônier, avant son retour en France.

Lundi matin, à l’heure dite un ballet d’annexes accoste Estran : les jeunes d’Exultet (Kêr Maï a quitté le mouillage la veille, grand-voile haute, une Vierge à l’Enfant dessinée dessus), le prêtre qui les accompagne, deux couples de plaisanciers et un équipier du Rallye des Iles du Soleil. La Vierge pèlerine « Notre Dame de l’Antigua », remise par l’évêque de Panama aux skippers du projet JMJ à la voile (comme aux autres délégations pérégrinant vers Panama), est confiée à l’équipage d’Estran pour la traversée de l’Atlantique. Après la messe, nous prenons le temps de discuter avec les jeunes et les autres équipages invités. Ces moments de rencontre et d’échanges ont été riches et nous aurons l’occasion de les poursuivre avec Louis, le jeune équipier d’un trimaran du Rallye des Iles du Soleil, autour d’une bière, à la veille de leur départ…

Pendant ce temps au mouillage, nous faisons quelques réparations utiles après notre traversée : refixer un pontet nécessaire pour arimer le tangon sur le pont, ses rivets oxydés ayant cédé durant notre navigation sous génois tangonné.

Nous avons enfin remis en service notre annexe et son moteur, et une fois les formalités d’entrée sur le territoire, accomplies, le lundi 19 novembre, nous sommes partis repérer la ville. Le ponton des annexes à la marina est plein, et il faut en franchir trois ou quatre pour mettre pied à terre. Après tant de jours en mer, il difficile de retrouver les bons gestes et les bons équilibres pour cet exercice, sans être trop ridicule, devant les consommateurs attablés au bar de la marina !

Au cours de ce temps au mouillage, nous pouvons découvrir l’activité capverdienne autour du port : barques et bateaux de pêche qui vont et viennent, ferries pour Santo Antão, porte-conteneurs, remorqueurs, barques remorquant des citernes, barques allant de voilier et voilier, à la rame, proposant du poisson frais aux plaisanciers, le tout sous des éclairages variés et révélant, selon l’heure du jour, des aspects divers de la baie de Mindelo.

 

Mardi, VoileOvent et nos amis Philippe et Joëlle viennent mouiller derrière nous, venant faire eux-aussi leurs derniers préparatifs avant la traversée ; ils avaient quitté La Palma cinq jours avant nous et ont eu le temps de découvrir d’autres îles du Cap Vert : Sal, São Nicolau, Santa Lucia, avant de rejoindre Mindelo. Ils nous racontent leurs aventures depuis les Canaries : fuite d’eau douce, réservoir vide (heureusement ils ont un dessalinisateur !), fuite de gaz, tangon cassé… De quoi nous faire réfléchir sur des précautions complémentaires !

Mercredi 21 novembre, les participants du Rallye de l’Arc prennent le départ de leur traversée vers Sainte Lucie, à 13 h. La marina se vide, les voiles emplissent la baie et nous pouvons appeler la marina à la VHF afin d’obtenir une place à quai pour la suite de notre séjour.

VoileOvent est placé à côté de nous et nous continuons de partager nos expériences de navigation ou nos découvertes de Mindelo.

Le port de Mindelo a été important du temps de la navigation à la vapeur : c’était le dernier port de ravitaillement en charbon avant la traversée de l’Atlantique. Cette période florissante se retrouve dans ses bâtiments douaniers en front de mer et dans les bas-reliefs ou faïences décorant le « marché africain ».

Ensuite, le site est resté longtemps à l’abandon et c’est à partir d’un ancien ponton de débarquement que la marina a été construite au début des années 2000 par un allemand qui a su lui donner tout son essor. Les bureaux et le magasin d’accastillage sont au bout du ponton en béton et les cinq pannes flottent au- devant de celui-ci, bien orientées selon les vents dominants. Une grande activité règne sur les pannes : les voiliers du Rallye des iles du Soleil doivent appareiller jeudi 22, et un autre itinéraire du Rallye de l’Arc doit prendre le départ dimanche… Le magasin derrière les bureaux ne désemplit pas : petits achats ou demandes de travaux (mécanique, voilerie, gelcoat, matériel électronique : tous les techniciens se trouvent à Mindelo !) Un service de laverie permet de déposer son linge soit le matin, soit le soir : sur le quai, une voiture aux couleurs de la laverie nous évite le déplacement jusqu’au magasin.

Pendant que nous étions au mouillage, nous avions pris rang pour une intervention sur notre nouveau pilote qui ne nous avait pas donné satisfaction durant notre descente vers le Cap Vert. Une fois amarrés, nous nous sommes signalés au magasin et un technicien est passé dès le soir même pour écouter les pilotes, examiner l’installation, avant de donner un diagnostic : démonter le moteur pour le réviser en atelier et déplacer le gyrocompas. Rendez-vous est pris pour le lendemain matin.

Commence alors une période d’attente : les techniciens ne manquent pas de travail, et s’il existe bien un ordre de prise en charge des réparations, des urgences toutefois retardent les interventions programmées… Nous passerons de longues heures à attendre donc les passages du technicien… Nous en profitons pour avancer de « menus travaux » : remplacer le pontet du coffre avant bâbord, qui arrête le bout de fermeture, trouver un moyen pour remettre en place le système de déclenchement de la lampe flash de la perche IOR (l’écoute du spi d’artimon l’avait arraché…). Menus travaux, mais qui prennent du temps : sortir le bon outillage, constater qu’il n’y a pas la pièce nécessaire, aller l’acheter…

Pendant ce temps, le vent de nord-est s’est levé, vendredi 23, et la chaîne-mère tenant nos corps-morts et mise à mal sous les rappels violents des bateaux voisins de grande taille et n’ayant pas d’amortisseurs sur les amarres. Il nous faut donc changer de place : après avoir été sous le vent du ponton, nous passons au vent du même ponton, amarrés sur deux bouées à l’avant. Les mariniers sont efficaces et avec 30 nœuds de vent, sont prompts à attraper les amarres et à les nouer sur les organaux des bouées de sorte que le bout ne s’use pas. Notre voisin Philippe nous a gentiment aidés, car le vent rendait bien nécessaire cet équipier supplémentaire d’un moment… Malheureusement, nos lourds voisins ont fait le même déplacement et deux heures plus tard leurs bouées avaient déradé, heureusement sans entraîner la nôtre ! Ils ont dû manœuvrer une nouvelle fois, dans le vent fort, et nous avons, pour notre part, fini notre séjour sans nouvelle péripétie de place …

Pendant les demi-journées où nous n’étions pas en attente du passage du technicien, nous avons appris à connaître Mindelo. La ville s’étire le long de la baie depuis Praia Laginha, plage de sable blanc au nord,

en passant par le port de commerce, le port des ferries, quelques pontons au pied du Club Nautique, le long du Cais d’Alfandega (quai des douanes) une plage s’étire devant laquelle sont mouillés quelques voiliers, puis le ponton de la marina, en face duquel se trouve l’ancien bâtiment des douanes, construit entre 1858 et 1861, devenu Centre Culturel,

et en poursuivant vers le sud, Praia d’Bote (la plage des barques) où les pêcheurs mouillent ou échouent leurs barques,

la statue de Diogo Alfonso, puis le rendez-vous des retraités et pécheurs à l’ombre d’une galerie où l’on reprise les filets, où l’on joue aux dames ou aux cartes. Ensuite la reproduction de la Tour de Belem de Lisbonne, construite entre 1918 et 1921, abrite le Musée de la mer, et enfin le marché aux poissons fort animé.

Un escarpement rocheux ferme cette première partie de la baie, et derrière lui, un chantier naval rejoint la partie sud de la baie, où on aperçoit des réservoirs pétroliers, une plage, quelques maisons au pied du Monte Cara qui ferme la baie.

Le plan de la ville est relativement orthonormé et nous trouvons, tout proches de la marina de petits supermarchés, le marché officiel, sur l’artère principale (Rua de Lisboa) remontant depuis le bord de mer, couvert, dans un beau bâtiment rénové et propre, avec fruits et légumes, boucherie et marchand d’œufs et volailles.

Derrière le marché aux poissons, la Praça Estrela abrite le « marché africain » : petit village de cabanes de marchands, de vêtements, de chaussures, de tailleurs etc… ; de petites allées, identifiées par des plaques, séparent les baraquements et des faïences décorent les panneaux des baraques, ou des bas-reliefs, retraçant l’activité florissante du port de Mindelo à la fin du XIX° siècle, et au début du XX° siècle.

Sous l’ancien kiosque à musique, des marchands de fruits et légumes proposent leur marchandise à même le sol, mais un peu plus loin, sous un vaste auvent, le véritable marché de fruits et légumes bien vivant et bien achalandé ! Ce sera l’occasion de tester des légumes nouveaux pour nous, pour savoir lesquels emporter durant notre traversée et comment les cuisiner : ignames, papayes vertes, ou encore de gigantesques courgettes pour l’aspect extérieur, mais à la pulpe orangée et au goût sucré de courge…

Enfin, nous prendrons le temps de parcourir à pied ces rues, juste pour découvrir les anciennes demeures coloniales aux couleurs de façades variées,

les rues aux maisons plus simples du quartier africain, à l’intersection desquelles on trouve des revendeuses de poissons secs ou frais, de légumes, de bananes, assises devant leurs cuvettes remplies de leurs produits. (A la tombée de la nuit, vers 18h, la police financière vient leur rappeler qu’il est temps de quitter les lieux).

En remontant vers le nord, nous trouvons des rues plus modernes, plus « riches » mais moins vivantes, vers la Praça Nova.

Nous faisons une halte au Palais du Gouverneur, à la belle façade rose, bien restaurée, au bout de l’artère principale, et visitons une exposition consacrée à Cesaria Evora, native de Mindelo. Photos, vêtements de scène, programmes, coupures de journaux, etc. tout un petit sanctuaire de la diva aux pieds nus.

L’ensemble de la ville est très coloré, les peintures sur façades ne manquent pas et l’art est partout présent…

      

La cuisine capverdienne a aussi été l’objet de notre curiosité et nous avons apprécié les saveurs de la catchupa (sorte de soupe ragoût aux légumes secs et frais) des poissons grillés accompagnés de jus épicé et sucré des petites mangues non greffées, de la camoca (préparation à partir de farine de maïs)…

La vie à la marina était riche elle aussi : outre Philippe et Joëlle sur VoileOvent, nous avons retrouvé Pierre, ami de notre équipier Yann, sur Heïva, accompagné de son équipage, en attente de fin de travaux avant la traversée. Ce sera l’occasion de quelques moments conviviaux notamment lors de notre dernière soirée à Mindelo… Dimanche 25 novembre, alors que nous étions occupés à faire notre plein de gasoil, un jeune homme errant sur les pannes nous salue gentiment et nous apprenons qu’il attend depuis 9 h ce matin que l’un des équipiers du voilier au mouillage sur lequel il est embarqué vienne le chercher. Midi approche, nous l’invitons à partager notre déjeuner. Jules nous explique qu’il souhaite rallier l’Amérique du Sud ; il voyage depuis plus d’un an, vivant de tours de cirque ou de vente de bijoux, et surtout de l’amitié et de l’entraide des personnes rencontrées. Après le Maroc, le Sénégal ; il a rejoint le Cap Vert, sa route ayant croisé le sillage des JMJ à la voile ! Jules est bien ce jeune homme que nous avions vu lisant la Bible sur un banc de la marina, Bible qui lui a été remise par l’équipage d’Exultet. Cette rencontre avec tous ces jeunes semble l’avoir marqué et nous pensons souvent à lui depuis ce dimanche, lui souhaitant de poursuivre ses belles rencontres enrichissantes.

Les échanges sur les pontons se font facilement et sans faux-semblant. Nous sommes tous dans les mêmes attentes et inquiétudes avant la traversée, même si pour certains, ce n’est pas la première, et nous nous rendons volontiers service, lorsque nous le pouvons. Ces échanges apaisent nos angoisses ; nous ne sommes pas seuls ! Mais c’est maintenant que les choses sérieuses vont commencer : plus de 2.000 milles marins à parcourir (soit 3.600 kilomètres environ) en comptant sur nos seules capacités à faire face à l’imprévu… malgré tout, la période devrait être favorable sur le plan de la météo, puisque les alizés devraient nous pousser dans la bonne direction…

Vous devez vous identifier pour laisser un commentaire : cliquez ici pour vous connecter .

Le site de la Grande Croisière...