Notes de lecture :

Le passage d’une thèse à un ouvrage plus grand public est une tâche difficile, rarement réussie. On a ici un récit passionnant, mariant l’Histoire et l’archéologie, issu d’une thèse de doctorat en Histoire moderne soutenue à la Sorbonne en 2019 par Florence Prudhomme sous la direction d’Olivier Chaline : Naviguer en temps de Révolution, le chevalier de l’Espine (1759-1826), de l’Indépendance américaine au service de l’Autriche, un destin au prisme de l’archéologie et de l’histoire. En 1782, à peine âgé de 24 ans et encore enseigne de vaisseau, L’Espine est chargé de convoyer de Brest à Saint-Domingue le capitaine de Courrejeolles chargé de messages cryptés en vue de la conquête des îles à sel stratégiques de la Caraïbe. Il réussira une première fois à échapper au blocus anglais par une audacieuse manœuvre à travers des récifs. Il sera ensuite acculé et sabordera son navire, le Dragon, mais en sauvant le message secret et tout son équipage. Fait chevalier de Saint-Louis et Cincinnati, sa carrière maritime continuera jusqu’à la Terreur, tantôt à Malte, tantôt dans la Royale, avant de passer, toujours marin, au service de l’Autriche. Ce livre, rigoureusement documenté mais qui se lit comme un roman, est largement illustré notamment par les dessins du co-auteur, Thierry Moné. Les nombreuses notes et annexes satisferont les historiens sans alourdir une lecture non érudite. On y trouvera beaucoup d’informations tant sur la construction navale, que sur les carrières dans les marines de l’époque ou même sur le « salvanos », l’ancêtre de nos bouées couronnes.

Jacques de Certaines pour la commission Livres De Mer

Ce livre original, publié par le CNRS, a été écrit par deux scientifiques. L’une est docteur en Histoire contemporaine, archéologue-scaphandrier professionnelle « classe IIB », l’autre docteur en histoire et colonel en retraite. Une courte relation de la découverte des débris d’une corvette explosée et coulée dans les eaux turbides bordant une plage de l’île de St Domingue, introduit le récit central, qui est celui de la vie et des missions, entre 1759 et 1793, de Joseph de l’Espine, officier de Marine au service des rois Louis XV et XVI. Ce récit raconte de manière vivante et précise le personnage central, mais d’autres également, ainsi que les circonstances et les cadres. Les maigres indices livrés par l’épave du Dragon ont dû être complétés par un énorme travail de recherche historique, qui est matérialisé par une abondante bibliographie et, dans la dernière partie du livre, plusieurs monographies sur des thèmes variés : les lieux, l’histoire et l’architecture navale, les arsenaux et les batailles, les uniformes, la ville de Toulon, les manœuvres, les dimensions des canons anglais, etc… Bref un ouvrage très sérieux et complet sur trente quatre années d’aventures guerrières entre les meilleurs ennemis traditionnels : Anglais et Français. Mais un texte très bien écrit et agréable à lire.

Jean-Michel Sautter pour la commission Livres De Mer

Une épave aux Antilles, découverte en eaux troubles, un corsaire anglais pris par les Français et sous le commandement d’un jeune enseigne, une mystérieuse mission secrète, l’occupation victorieuse d’une île proche de Saint Domingue contre Nelson lui-même, tous les ingrédients d’un nouveau roman d’aventures maritimes sont ici réunis. Pourtant il s’agit d’un ouvrage historique rigoureux où chaque détail est vrai et recoupé.
Le lecteur contemporain, plaisancier de surcroît, trouvera de nombreux sujets d’étonnement : comment en trois mois un consul et un jeune commandant, au 18ème siècle, pouvaient faire construire et armer une frégate de plus de 23 mètres en terre étrangère ou une comparaison des méthodes de mises à l’eau des chaloupes entre la marine anglaise et la marine française ou encore comment cette dernière s’y prenait pour effectuer la manœuvre d’homme à la mer.
Cela fait un certain temps que l’archéologie sous-marine permet à l’histoire navale de progresser. L’on se sent redevable envers Florence PRUDHOMME et Thierry MONE à la fois de ce qu’ils ont exhumé sous l’eau et dans les archives et d’avoir su nous le faire partager dans un style simple et agréable et avec des illustrations explicites et claires.

Maurice Bénichou pour la commission Livres De Mer