Grèce 15 - 30 Août
Mardi 15 Août, nous quittons le Monténégro à 11h30, en direction de la Grèce. Nous choisissons une route qui passe au large de l’Albanie, presque plein Sud, pour atteindre une des premières îles ioniennes, au Nord de Corfou : l’île Othonoi. Les premières heures de la navigation se font à la voile, vent de travers, mais la mer devenant agitée à mesure que le vent forcit, et générant une houle d’ouest, la suite de la navigation sera moins confortable et l’appui du moteur sera nécessaire pendant 14 heures pour cette traversée de 32 heures. La houle s’amortit au petit matin et le vent passe au Nord-Nord-Est, puis Nord et ensuite Nord-Ouest, ce qui nous permet de bons moments de voile, sous spi.
C’est sous cette dernière allure que nous approchons de l’île Erikoussa, que nous avons finalement préférée à Othonoi, en début d’après-midi du 16 Août. Ce mouillage nous permet de découvrir nos premiers paysages grecs : des églises, des moulins, des oliviers, des cyprès, des plages de sable ocre, des falaises blanches.
En Grec, île s’écrit Nisos ou plus exactement NIƩOƩ, et se prononce Nissos….
La suite de notre périple en Grèce nous conduira le 17 Août à Gouvia Marina, au Nord-Est de Corfou, pour accomplir les formalités d’entrée sur le territoire grec. Cette marina a été construite dans une anse, bien protégée, occupée auparavant par des pêcheurs.
Nous avons pu réaliser toutes ces formalités directement à la marina, les services de polices communiquant par téléphone et fax avec les services des douanes de Corfou. En effet, nous rentrions à nouveau dans un pays de l’Union Européenne après notre passage par le Monténégro et cela nécessitait un enregistrement auprès des douanes…
De là, nous avons navigué en mer ionienne :
Le 18 mouillage à Mourtos, sur la côte continentale, (étape de 24 milles) ;
du 19 au 21 escale à Cléopatra Marina, en face de Préveza (côte continentale), (43 milles) ; le 22, mouillage dans la Baie Tranquille, en face de Nidri sur l’île de Levkas, (17 milles) ;
le 23, mouillage dans l’anse Abelike, sur l’île Méganisi, (33 milles) ; le 24, mouillage à Port Vathi, île d’Ithaque, (24 milles), après un mouillage à midi, dans une anse plus au Nord ;
le 25, mouillage dans l’anse Athéras, au Nord de l’île de Céphalonie, (26 milles) ; le 26, quai du port d’Argostoli (c’est-à-dire, mouillage et amarres à quai), au Sud de Céphalonie, (32 milles) ; le 27, mouillage dans l’anse Ayios Andreas au Sud de l’île d’Ithaque, (45 milles) ; le 28, mouillage à Mesolongion à l’entrée du Golfe de Patras, (36 milles) ; le 29, mouillage dans l’anse de Navpaktos, dans le Golfe de Corinthe, (26 milles) ; le 30, escale à Patras, (47 milles).
Notre escale à Préveza (Cléopatra Marina) nous a permis d’accueillir nos amis Joseph et Krystèle, pour une semaine.
Les habitués de la mer ionienne ont dû noter la longueur de certaines étapes, en contradiction avec les distances établies sur les cartes.
Ainsi pour aller de la Baie Tranquille sur l’île de Levkas, à l’anse d’Abelike sur Méganisi, nous avons commencé par contourner l’île de la famille Onassis (Scorpio) puis toute l’île Méganisi par l’Est, avec un petit mouillage pour le déjeuner dans l’anse Svarna : mouillage sur du sable dans un petit espace entre les rochers, une ruine à terre et un bout de plage, avec une balançoire installée entre deux oliviers.
Pas une habitation visible, seule la garrigue nous entoure, et les cigales s’égosillent, nous sommes en plein mois d’août ! La renverse de vent de l’après-midi nous fera quitter précipitamment l’endroit, car nous approchons des rochers. Nous poursuivons alors notre descente vers le Sud de Méganisi et contournons la « queue » de l’île et découvrons les paysages variés de la côte Sud-Ouest : des falaises aux couleurs variées : blanc, gris ocre, des plissements et des formes de roches diverses et de nombreuses grottes plus ou moins grandes, certaines donnant des reflets turquoise à l’eau. L’une d’elle aurait abrité un sous-marin durant la deuxième guerre mondiale et est l’objet de visites organisées.
Nous remontons vers le Nord de l’île de Méganisi en empruntant le « Stenon Meganision », détroit entre cette île et l’île de Levkas. Au soleil du soir, les falaises de Levkas étaient dans l’ombre, mais le soleil déclinant éclairait encore par endroits les plages de sable ocre, les oliviers au bord de l’eau de Méganisi.
Nous avons fini de contourner le Nord de l’île pour rejoindre l’anse Abelike, au milieu de toutes les indentations de cette île.
Une autre étape paraît longue, entre Argostoli et Ayios Andreas : après un bord de spi, au Sud de Céphalonie, le vent sur la côte Est de cette île, pour rejoindre le Sud d’Ithaque, nous a contraints à de longs bords de près, comme le dit l’adage : « deux fois la route, trois fois la peine ». Le mouillage du soir dans l’anse sauvage, avec une eau bleu saphir, et les chèvres comme accueil sur la plage, sera dans nos mémoires.
Enfin, l’étape la plus longue, reste celle entre Navpaktos et Patras. Sur la carte, en route directe, il n’y a pas plus d’une douzaine de milles. Mais le vent d’Est-Sud-Est s’est levé dans la nuit, et depuis 00 heures, le 30, nous surveillons notre mouillage, devant Navpaktos, à tour de rôle. Vers 6 heures, après une apparente accalmie, le vent reprend de plus belle et nous dérapons. Décidément, les mouillages dans la vase ne nous conviennent pas ! Notre appareillage est immédiat, et nous débutons notre longue journée de navigation.
Nous tentons tout d’abord de rallier l’étape suivante prévue plus à l’Est sur l’île de Trizonia. Le vent, établi à 20 nœuds, nous permet un près assez efficace, et la mer n’est pas encore trop formée. Nous contournons l’île de Trizonia et comme nous nous y attendions, la petite marina non terminée et abandonnée, est pleine, les bateaux y doublent leurs amarres et le seul voilier au mouillage tosse déjà beaucoup. Nous repartons plus à l’Est à la recherche d’une anse abritée et pas trop profonde. Mais les sondes annoncées par la carte et notre sondeur ne concordent pas : à 10 m de la côte, pour une sonde de 7 m sur la carte, nous sommes toujours à 30 m sur notre écran. Le vent continue de forcir et la mer devient forte. Fatigués, nous décidons, de tourner le dos au vent et de partir portés par la mer et le vent jusqu’à Patras, toutes voiles arisées.
A 16 heures, nous sommes heureux et soulagés d’amarrer le bateau à la marina de Patras. Le dessalage du bateau s’impose, ainsi qu’une douche réconfortante pour l’équipage !
Notre navigation est aussi heureusement pleine de traversées plus calmes, au moteur, ou à petite allure à la voile. Et nous pouvons ainsi admirer ce que nous réservent ces moments sur l’eau :
les couchers et levers de soleil avec le rayon vert, aperçu lors de la descente depuis le Monténégro ;
« l’aurore aux doigts de rose », comme le dit Homère, lors d’un départ matinal, volontaire, du mouillage d’Athéras ;
les rayons du soleil couchant à Patras ;
le passage sous le pont entre Rion et Antirion, à l’entrée du Golfe de Corinthe, un des plus hauts du monde, les hauteurs entre les piliers (appelées aussi tirant d’air) variant entre 25 et 50 m ;
les îles ioniennes flottant dans la brume du matin ;
le banc de dauphins réveillés par notre passage qui viennent jouer à l’étrave quelques minutes ; les 6 dauphins venant jouer longuement et apprendre à un bébé dauphin le jeu dans l’étrave ; les tortues croisées au large du Monténégro et autour de Prévéza, Agrostolion et Mesolonghi ;
le phoque regardant les bateaux passant alentours avant de replonger ; et les nombreuses variétés de mouettes ; les grandes nacres au mouillage ; les méduses ;
les variations de tons de l’eau du bleu saphir au bleu émeraude, ou au vert glauque ; les variétés de tons des côtes de toutes ces îles : falaises d’un blanc éclatant, ocre des plages.
Toutes ces étapes nous ont permis quelques visites et notamment nos escales dans un port :
Corfou et sa vieille ville : les ruelles ici encore ont un air italien, la longue suprématie vénitienne ayant laissé ses marques.
Mais l’Esplanade, par son « liston » (maisons à arcades abritant restaurants et magasins) construit à la ressemblance de la rue de Rivoli à Paris, rappelle la présence française napoléonienne,
et le terrain de cricket sur l’esplanade est la signature de la présence anglaise.
Ici aussi, nous avons été surpris par l’état général des bâtiments, très abîmés, ou partiellement rénovés.
Préveza et ses petites ruelles remplies de tavernes, abritées par des treilles à la végétation variée, sa grande rue commerçante, et partout de petits oratoires entretenus.
Navpaktos : petit port arrondi, entouré de remparts crénelés, qui courent ensuite jusqu’au sommet de la colline qui surplombe la ville ; ainsi pas moins de cinq enceintes de fortifications se sont succédées pour protéger ce port et compartimenter la ville depuis la citadelle au sommet de la colline.
Port Vathi, dans son anse arrondie, au fond d’un golfe profond, avec sa petite île, ses maisons colorées le long du bord de mer, et ses nombreuses tavernes, apportant de l’animation à cet abri qui paraît sûr tant il est profond, mais qui est tout ouvert au vent dominant tombant des montagnes environnantes, et levant un clapot coriace. Dans ces fonds de vase, la tenue de l’ancre est continuellement surveillée…
Nous avons revu quelques points d’histoire également ; à défaut de pouvoir laisser longuement le bateau dans les mouillages, car nos expériences de dérapages sont nombreuses, nous avons navigué et abordé des côtes en nous rappelant la bataille d’Actium, qui a permis à Octave, en 31 av. J.C., de vaincre la flotte d’Antoine et Cléopâtre, et de conquérir ainsi la suprématie sur l’empire romain naissant. Actium est la cap Aktion, langue de terre en face de Préveza (et cela vous explique le nom de Cléopatra Marina).
A Navpaktos, nous avons fait mémoire de la bataille de Lépante (7 octobre 1751) ; en effet, c’est l’ancien nom de ce petit port fortifié, qui abritait alors les galères ottomanes ; la bataille se serait déroulée un peu plus à l’Ouest dans le Golfe de Patras, entre l’île d’Oxia et la lagune de Mesolonghi. Le petit port de Navpaktos garde le souvenir de cette bataille, au cours de laquelle Cervantès perdit l’usage de sa main gauche, en lui édifiant une statue.
Dans ces navigations entre les îles ioniennes, nous avons parcouru un certain nombre de « stenoi », détroits ou chenaux.
Le premier, au Nord était celui séparant l’île de Corfou de la côte albanaise ; cette dernière est très aride et contraste avec la verdure de l’île.
Celui entre Levkas et le continent au Sud de Prévéza est un chenal balisé entre des marais salants et la ville de Levkas sur l’île du même nom.
Ce chenal est une belle promenade au moteur entre oiseaux, épaves, ruines, île verte et continent aride, après l’attente de l’ouverture du pont routier qui relie l’île au continent.
Auparavant nous avions parcouru le chenal de Préveza, pour rejoindre Cléopatra Marina ; ce chenal relie la mer à l’Ouest, au Golfe à l’Est entre Prévéza et le cap Aktion : les courants de marées créent dans ce chenal un phénomène de courants et tourbillons assez semblable à celui de Messine, mais d’une violence moindre. Néanmoins, si la navigation y est possible, l’entrée et l’accostage dans Cléopatra Marina ne peut se faire qu’avec l’aide efficace et sûre des mariniers de la Marina, pour un amarrage qui n’est pas sans rappeler également celui de la marina de Messine : digue flottante, recevant les embruns du fort clapot, amarrage sur plusieurs points, défenses placées très bas.
Nous avons déjà décrit le détroit entre l’île de Levkas et l’île Méganisi ; selon l’heure du jour, les éclairages mettent en valeur les plages et les oliviers de l’une ou les falaises de l’autre.
Enfin, nous avons parcouru le chenal de Mesolonghi par deux fois, traversant ainsi un paysage de maisons sur pilotis (anciennes cabanes de pêcheurs, plus ou moins entretenues ou réparées), de pontons en bois pour barques de pêche, de marais salants et des teintes diverses de l’eau, avec de nombreux oiseaux, rappelant par certains aspects, notre Camargue.
Il est notable que le vent dominant dans cette partie de la mer Ionienne et à cette période de l’année souffle du Nord-Ouest et se lève en début d’après-midi jusqu’à force 4 ou 5 Beaufort, puis se calme et disparaît en général le soir. Cette régularité (pas exempte d’exceptions comme on l’a évoqué), permet d’établir son programme avec un assez grand confort. Nous avons pu faire beaucoup plus de voile ici qu’en Croatie, pour le plus grand bonheur des équipages et des bateaux !
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