16 novembre - 8 décembre 2019 Remontée vers La Martinique
Le 16 novembre, au matin, nous décidons de larguer les amarres et de commencer notre remontée vers La Martinique, en compagnie de Cathy et Pierrick, sur leur Super Maramu 2000 « Eloÿse ». La météo annonçait la veille un peu d’air, mais plus guère au petit matin. Cette première journée de navigation sera une journée « méditerranéenne » ! Pas de mer, peu de vent, et navigation presque totalement au moteur sur la trentaine de milles nous séparant de Carriacou. Seule, la belle et ample ondulation de la mer, arrivant de l’est, dans les canaux, nous rappelle que nous sommes entre Atlantique et Mer Caraïbe.
Des dauphins ont pris le temps de nager dans notre étrave, les adultes apprenant aux plus jeunes à appréhender la vitesse du bateau et à jouer avec la vague d’étrave.
Ils ont apporté un peu de diversion à notre navigation, alors que nous écoutons avec une certaine inquiétude un frottement dans l’arbre d’hélice, lors de notre tentative de navigation à la voile. Au moteur également, nous sentons que quelque chose ne tourne pas rond…
A l’arrivée, nous plongeons rapidement sous le bateau ; rien n’est pris dans l’hélice ni dans l’arbre, mais dans la cale moteur, l’arbre d’hélice est très chaud ; nous purgeons le « presse-étoupe » (plus exactement, le joint tournant), et il en sort de la vapeur d’eau, avant que l’eau n’arrive correctement. Nous en concluons qu’il a dû sécher durant notre temps à quai, malgré la pression de l’eau, et que nous avons navigué avec un joint tournant non lubrifié. Un carénage est prévu début décembre en Martinique ; nous pourrons envisager de le changer à nouveau, car il a dû s’abîmer.
L’escale à Carriacou a été l’occasion de retrouver Madeleine et Georges, qui avaient quitté Port-Louis Marina début novembre afin d’aller caréner leur bateau et effectuer des réparations mécaniques, au chantier de Tyrell Bay. L’île a reverdi durant la saison des pluies et paraît moins aride.
Pour la suite de notre remontée vers La Martinique, nous avons fait escale aux Tobago Cays. La navigation, au moteur (qui semble « tourner rond » désormais), depuis Union vers les îlots de Petit Bateau et Petit Rameau se fait par une belle matinée, avec un très bel éclairage, rendant Union Island et son mouillage de Clifton Harbour plus hospitaliers que lors de notre premier passage.
La visibilité est remarquable, puisque au sud-est on devine les contours de l’île de Tobago, (distante pourtant de plus de 80 milles !) et qu’au nord, les différentes îles de Mayreau, Canouan, Bequia, Moustique, laissent apparaître leurs pitons en plans successifs, dans des tons passant du vert au bleu pour les îles les plus lointaines ; et autour de nous, la mer conjugue turquoise et bleu plus profond…
Dans les Tobago Cays, sur bouée entre Petit Rameau et Petit Bateau, nous pouvons partir à la découverte des fonds autour de nous ; l’eau est chaude, et la visibilité excellente, nous offrant ainsi une belle promenade autour de la pointe est de Petit Bateau. Entre les poissons colorés, agiles, ou paresseux, bercés par le mouvement de l’eau, et les architectures coralliennes, nous savourons, une nouvelle fois, le spectacle silencieux de ces eaux.
Pierrick nous montre un coquillage nommé « monnaie caraïbe » : sorti de l’eau, il présente une coquille en forme de fuseau, d’un rose orangé clair ; mais une fois remis dans son élément, le mollusque ressort de sa coquille en couvrant ses parois extérieures d’une sorte de peau de camouflage : de multiples petites taches marron, cernées de noir cachent la belle couleur rosée du coquillage. Nous n’aurons pas eu l’occasion de nager près des tortues, nombreuses ; nous les contemplerons depuis l’annexe lorsqu’elles viennent nager à la surface.
Nous cèderons volontiers à l’offre de barbecue sur la plage, des « boat boys » et dégusterons nos premières langoustes de la saison. Une fois encore, nous sommes étonnés de la taille des crustacés et savourons l’ensemble des plats proposés.
Nous poursuivons notre remontée en gagnant l’île de Bequia ; le vent nous permet d’effectuer cette partie du trajet à la voile. « Eloÿse » nous précède et nous nous retrouvons au mouillage dans la baie Princess Margaret.
Nous sommes sur du sable et nous pouvons envisager une escale de trois jours. Nous y retrouvons nos amis Claudie et Hervé sur leur Grand Soleil 47 « Happy », qui avaient quitté Grenada avant nous et qui vont poursuivre leur remontée vers La Martinique avec nous.
Tandis que les uns travaillent sur « Eloÿse » à remplacer l’alternateur et à rechercher une fuite électrique, les autres partent en promenade vers Friendship Bay, sur la côte Atlantique.
Le temps est gris, rendant la marche moins usante que sous le soleil. Ici aussi, la nature a enrichi ses tons de vert grâce à la saison des pluies ; au col, entre Admiralty Bay et Friendship Bay, les habitants installent les décorations lumineuses de Noël, cabris ou rennes sont accrochés au bord des routes et des arceaux signalent les trottoirs.
Nous partageons nos expériences avec « Happy », et trouvons une nouvelle épicerie pour nous approvisionner de victuailles inespérées sur cette île ; même le magasin est improbable : un joli chalet en lambris aux vernis impeccables au fond d’un jardin !
L’escale suivante sera Marigot Bay sur l’île de Saint Lucie. Nous appareillons à l’aube pour cette longue étape, que nous parcourons au moteur, une fois encore, (une nouvelle étape « méditerranéenne ») et arrivons suffisamment tôt pour prendre nos bouées à l’intérieur de Marigot Bay et pour établir notre déclaration d’entrée avant la fermeture des bureaux.
Nous retrouvons avec plaisir le calme de cette mangrove, à l’abri derrière sa plage de cocotiers, caressée par les rayons du soleil levant ;
le charme étrange des installations hôtelières et sa piscine à débordements, sur plusieurs niveaux.
Nous aurons l’occasion de jouer une partie de pétanque inattendue dans ces lieux, sur un parking au terrain caillouteux et inégal, rendant le jeu très aléatoire ; nos amis prévoyants avaient leur matériel ! Nous avons aussi découvert d’autres paysages remarquables lors d’une balade en taxi jusqu’à Castries : la vue sur Marigot Bay,
puis dans la remontée le long de la côte après le dépôt pétrolier du Grand Cul de Sac, une belle perspective sur une arche de roche, avant la vue plongeante sur Castries.
Le vent semble s’annoncer pour la suite de notre navigation, et le retour vers Sainte Anne se fera avec un très grand sérieux, puisque nous avons décidé de tenter une régate : 20 à 25 nœuds de vent apparent, une houle pas trop importante, et des fous jouant à nouveau dans les voiles, pendant que nous remontons, au près, le canal entre Sainte Lucie et La Martinique ; les « concurrents » sont le Grand Soleil 47 « Happy »,
le Super Maramu 2000 « Eloÿse »,
et le Maramu « Nissos 3 ». Autant dire que le calcul des handicaps et « ratings » a fait l’objet de nombreuses discussions, ainsi que le palmarès ! La ligne de traine de « Happy », en tête, a emporté un casier à l’approche des bouées d’entrée du chenal du Marin, qui nous servaient de ligne d’arrivée, et a donc perdu un temps précieux pour s’en débarrasser. De ce fait, « Eloÿse » et « Nissos » ont pu réduire l’écart à l’arrivée, et en temps compensé, obtenir un classement très honorable. Un seul regret, personne n’a péché de poisson dans le canal, que nous aurions pu partager à l’arrivée…
Nous retrouvons avec plaisir la plage et le village de Sainte Anne, et les saveurs de Martinique que nous partageons sur « Eloÿse ».
Nous passons quelques jours au mouillage, alternant promenades, baignades, et entraide pour les travaux sur « Eloÿse ». La saison des pluies a bien modifié les paysages : les Salines le long de la Trace des Caps sont bien pleines, les mornes sont bien verts, et nous découvrons de nouvelles fleurs…
Comme nous avons du temps, et une météo clémente, nous partons deux jours vers la Grande Anse d’Arlet, espérant pouvoir courir la régate de revanche… Nous parcourons l’étape aller au moteur, longeant les côtes de Sainte Lucie et de Trois Rivières, où les champs de canne à sucre apportent leurs teintes de vert tendre. Au passage des Fous, les oiseaux en grand nombre volent en criant, autour du Rocher du Diamant, nuée de taches blanches sur le bleu de la mer et le noir de la roche.
Dans Grande Anse, nous suivons le sentier aquatique, le long de la berge nord de l’anse, bénéficiant d’un bel éclairage au zénith, puis nous irons observer les poissons, dans les tombants entre la pointe Lézarde et la pointe Burgos, au sud ; là, les remous de la houle troublent l’eau, mais ne perturbent pas les nombreux poissons colorés qui y jouent.
Vient l’heure ensuite de la revanche tant attendue : pour le retour de Grande Anse vers Sainte Anne, nous tentons cette deuxième régate. Mais le vent faible, pour cette navigation au près entre la houle des canaux et les hauts fonds de la côte de Sainte Luce, ont permis au seul « Happy » de franchir la ligne d’arrivée avant sa fermeture et c’est à la nuit tombante que nous mouillons à Sainte Anne !
Nous passerons ensuite quatre jours au port du Marin pour pouvoir faire réviser le moteur.
A l’entrée de la baie, un cargo arrivé la veille, prépare les bers pour recevoir les mini 6,50, de la Mini-Transat arrivés au Marin quelques jours plus tôt, et encore alignés sur leur ponton flottant devant la plage.
Nous en profiterons pour louer une voiture et aller nous plonger dans l’effervescence de la préparation de Noël dans les centres commerciaux, à la recherche d’un nouvel aspirateur, d’une nouvelle perceuse sans fil, de manchons pour notre filtre à eau douce… Accompagnés de Claudie et Hervé qui nous servent de guides, nous trouvons bien un aspirateur, mais rien d’autre de ce que nous souhaitions. En revanche, cela a été l’occasion d’acheter une crèche éclairée et aux santons bien fixés devant l’étable (avantage non négligeable lorsqu’il s’agit de naviguer au près !), une guirlande solaire et un projecteur détecteur de présence, solaire également.
Un petit tour au mouillage à Saint Anne nous permet de partager encore quelques moments avec Claudie et Hervé, Pierrick et Cathy, et également Joëlle et Philippe de « VoileOvent » revenus de leur navigation entre Grenada, Bonaire et Saint Martin. Nous sommes heureux de les retrouver après les avoir quittés en septembre, à Saint-Georges, ne pensant pas les revoir si tôt !
Dimanche 8 décembre, un apéritif sur la plage du Club’Med nous réunit tous ainsi que les amis des amis (soit 7 bateaux au total) et nous passons un bon moment de convivialité au soleil couchant.
Ce que nous retenons de ces trois semaines de remontée vers La Martinique, ce sont toutes ces rencontres qui ont ponctué nos escales ; naviguant à trois bateaux, chaque équipage rencontrait un autre équipage croisé, qui à Trinidad, au chantier à terre, qui au cours des navigations de l’hiver précédent, qui au mouillage à Grenada, à Carriacou ou à Bequia. Rencontres parfois éphémères, autour d’un apéritif sur l’un ou l’autre des bateaux, d’un « Happy Hour » sur un bar flottant, mais qui nous marquent, par un aspect de l’histoire, que nous avons pu percevoir, de ces personnes ; les unes nous interpellent, dans les choix de vie qu’elles ont posés, d’autres sont de belles personnalités qui nous ont touchés, d’autres enfin resteront de simples rencontres agréables. Les réseaux sociaux nous permettent de suivre les navigations de certains et nous prenons plaisir à lire leurs aventures, prolongeant ainsi le plaisir de la rencontre. Par ailleurs, cette navigation à trois bateaux nous a offert de très bons moments d’entraide et de convivialité : l’aide apportée à Pierrick dans sa recherche de fuite électrique et le remplacement de son alternateur, l’aide apportée par Pierrick lorsqu’il a fallu changer de mouillage, (la chaîne prise dans des blocs ne s’était pas étirée comme celle de notre voisin devant et nous ne pouvions plus remonter l’ancre sans lui tomber dessus), les apéritifs qui se prolongent en dîner à la fortune du pot, la partie de pétanque à Marigot Bay, les balades avec Cathy, l’excellente paëlla de Pierrick, précédée d’un apéritif « flamenco » dans un bar de la plage de Grande Anse, ses non moins savoureux foies gras, les moments de plongée en palme masque tuba, dans les Tobago Cays, ou à Grande Anse, l’incontournable soirée barbecue aux Tobago Cays avec les langoustes grillées, et toutes les rencontres improbables faites en cette fin d’année 2019… Tout cela nous fait espérer que l’année 2020 sera dans la même veine avec de nouveaux sites à découvrir, et de nouvelles rencontres enrichissantes à susciter !
Vous devez vous identifier pour laisser un commentaire : cliquez ici pour vous connecter .