7 - 16 janvier 2020 Ile de La Dominique
Quittant La Guadeloupe, nous arrivons en début d’après-midi, mardi 7 janvier, dans Prince Ruppert Bay, la baie de Portsmouth en Dominique. Nous espérons que la tempête qui se prépare va nous laisser du temps pour visiter cette île que Joëlle et Philippe de « VoileOvent », Cathy et Pierrick d’« Eloyse », notamment, nous ont tant vantée.
Lors de notre précédent passage, en remontant le long des côtes, nous avons eu l’impression de voir une île « alpine », faite de pics couverts d’une végétation qui faisait penser à des conifères. Nous savons bien qu’il n’en est rien ; il nous faut donc aller voir de plus près !
L’île de La Dominique, dans l’histoire des Antilles, a longtemps eu un statut à part : Français et Anglais se la sont disputée longtemps sans arriver à soumettre les Indiens caraïbes qui l’habitaient. En désespoir de cause, un statut quo fut établi ; en 1748, l’île fut décrétée « zone neutre appartenant aux Caraïbes ». Puis, les combats reprirent, les Indiens caraïbes furent repoussés à l’intérieur de l’île, dans une réserve, et l’île devint anglaise après 1805. Les appellations des lieux rappellent ce passé tourmenté entre Français et Anglais : Roseau, l’actuelle capitale, ainsi nommée en raison des vallées de roseaux l’entourant, a remplacé l’ancienne capitale, au nord, Portsmouth, mais l’aéroport près de Roseau est dénommé Canefield Airport ; Pont Cassé se trouve à la jonction de quatre routes au centre de l’île, Là-haut (bien aspirer le « h ») est un village tout au nord de l’île… Héritant de ce passé, les Dominiquais, placés entre Martinique et Guadeloupe, parlent créole et s’expriment volontiers en français, depuis le simple : « bonjour, comment ça va ? » échangé dans la rue, jusqu’à des conversations plus poussées.
Indépendante en 1978, l’île a souffert en 1979 du cyclone David, puis de la tempête Erica en 2015 et du cyclone Maria en 2017 !
L’île a eu longtemps mauvaise réputation, en ce qui concerne la sécurité des voiliers mouillés sur rade, mais les habitants de l’île ont compris que le tourisme était une ressource importante et les deux mouillages principaux de l’île, Prince Ruppert Bay (Portsmouth) au nord et Roseau, au sud, sont maintenant aménagés sur bouées. Les services des « boatboys » sont joignables sur VHF (16) et ils assurent également une surveillance des bateaux mouillés sur rade, peuvent approvisionner en eau les navires, tout en apportant des services d’« agent », en conduisant les plaisanciers aux différents services administratifs d’entrée sur le territoire. Ils proposent aussi des tours de visite de l’île en taxi.
Au nord, à Portsmouth, les « boatboys » ont créé une association « P.A.Y.S » (Portsmouth Association Yacht Services). Leurs barques portent ce sigle, en plus de leur nom, assurant ainsi au plaisancier une garantie de service et de prix fixe, (en ce qui nous concerne, une remise de 2 nuits nous a été offerte, à partir de 5 nuits sur bouée). Par ailleurs, ils organisent, une à deux fois par semaine, une soirée barbecue dans leurs « locaux » : un vaste auvent est aménagé sur la plage, devant un ponton en cours de construction, sous lequel sont installés tables et bancs, sono et estrade, barbecues et cuisines de plein air. Très organisés, les « boatboys » nous accueillent sur la plage, aident à tirer les annexes au sec ; elles seront surveillées durant la soirée. Autour des verres de « rhumpunch », les langues se délient et nous sommes étonnés et amusés de rencontrer une marseillaise, équipière de régates, habituée de la Société Nautique de Marseille ; nous échangeons longuement avec deux jeunes couples venus de Normandie par la mer, sur un brise de mer, ou avec une jeune famille avec deux filles en catamaran. Comme souvent, nous échangeons sur notre traversée passée, sur nos navigations et expériences récentes et sur nos futures navigations. C’est toujours un moment d’enrichissement réciproque, prolongé parfois par des apéritifs sur un bord ou un autre pour partager des renseignements. La soirée se poursuit en dansant sur le sable…
En arrivant en début d’après-midi, nous avons rejoint nos amis sur « Happy » (Claudie et Hervé) et sur « Nééma » (Marc), avec qui nous passerons ce séjour dominiquais, placés deux jours auparavant sur bouées par les bons soins d’Eddison. Ce dernier parle français et nous a proposé deux jours de visite « classique » de l’île en taxi, guidés par Paul-Honoré, qui parle français lui-aussi.
Notre première journée de visite est consacrée à la partie nord de l’île. Dans Portsmouth notre route bifurque vers l’est et après avoir longé l’inévitable terrain de cricket ou de football, nous grimpons vers un col qui nous offre une vue sur la côte caraïbe et sur la côte atlantique.
Serpentant ensuite entre ravines et plateaux (sur l’un d’eux, le village est le bien-nommé « Terre-Plate »), nous atteignons la côte au vent ; les anses se succèdent avec leurs plages de sable gris ou doré, leurs rochers battus par la houle.
L’Anse de Mai a longtemps été un lieu de contrebande avec Marie-Galante, toute proche ; mais police et douanes interviennent régulièrement contrecarrant cette activité.
Dans de nombreux villages, Paul est fier de nous indiquer les écoles reconstruites après le cyclone Maria.
Cette partie de l’île a servi de décor pour le tournage des films « Pirates de Caraïbes » 2 et 3, et nous admirons ainsi Hampstead Bay. Un peu plus loin, Calibishie se distingue par ses « red rocks », anciennes coulées de lave qui forment un petit promontoire aux tons d’ocres variés entre des plages au sable sombre. Une petit tour (payant) sur ce promontoire permet d’apprécier la couleur de la terre et l’aridité du lieu ; les couleurs de l’eau varient devant les anses marquant ainsi l’étroite passe entre les récifs pour les barques des pêcheurs.
Notre route se poursuit, alternant zones de cultures (bananiers, cocotiers) et plages ; nous longeons la côte atlantique, en direction du sud de l’île ; nous contournons la piste rallongée de l’aéroport de Melville Hall ; c’est le plus grand des deux aéroports de l’île, récemment pourvu d’éclairages, mais la topographie de l’île ne permet pas l’installation d’un aéroport de grande envergure.
Nous traversons ensuite Marigot, dont le port, aux infrastructures financées par les Japonais, représente un abri sûr sur cette côte peu hospitalière.
Nous arrivons ensuite en territoire caraïbe, vers Monkey Hill où « Pagua Rock » (le Rocher du Pouvoir) domine la plage.
Une légende caraïbe est attachée à ce rocher au sommet duquel se trouverait une fleur rare ; mais le rocher est habité par des serpents dangereux ; celui qui parviendrait à atteindre le sommet et à en rapporter la fleur, tout en ayant survécu aux serpents pourrait tout commander…
Un peu plus loin, à Kalinago Barana Aute se trouve l’entrée (payante) de la réserve indienne dans laquelle Paul nous assure que l’on trouve les anciennes cases, de l’artisanat ; mais nous poursuivons notre route, nous arrêtant aux échoppes placées en bordure, proposant calebasses gravées, travaux de vannerie, huiles ; ce sera pour nous l’occasion d’acheter une corbeille, qui détournée de son usage remplacera l’abat-jour bien usé de l’éclairage du cockpit.
Le nom surprenant d’« Escalier Tête de Chien » évoque le lieu où seraient arrivés les serpents depuis La Martinique, et auraient dévoré tous les habitants sur leur chemin vers les hauteurs.
Approchant de Castle Bruce, la plus grande commune de La Dominique, nous apercevons le Morne Trois Pitons, volcan qui culmine, au sud de l’île à 1342 m, (au nord de l’île, le Morne Diablotins le dépasse de peu à 1447 m d’altitude). Sur les flancs de ce volcan se trouvent de nombreux sites : des cascades d’eau fraîche, des sources d’eau chaude, des sources sulfureuses… Pour ce premier jour de visite, nous ferons halte à « Emerald Pool » : une vasque d’eau qui prend des teintes d’émeraude, alimentée par une chute de douze mètres. Nous accédons à ce site par un chemin aménagé dans la forêt tropicale qui n’a pas encore recouvré toute sa canopée ; sur place, c’est avec prudence que nous nous avançons dans la vasque fraîche et savourons vite le plaisir de ce bain, au milieu de ce camaïeu de verts.
Notre route se poursuit traversant l’île vers la côte caraïbe, pour arriver à Canefield Airport, au nord de Roseau.
Longeant la côte, la route nous ramène vers Portsmouth, au nord, passant à travers la « dry forest », plus sèche, moins arborée (comme son nom le laisse deviner) que la « rainforest » que nous venons de quitter. Cette route est une large artère, qui, du fait de son importance, est qualifiée de « highway », mais nous sommes loin de nos autoroutes : pas de double voie, ni de terre-plein central pour séparer les voies de circulation, très peu de panneaux de signalisation, pas de marquage au sol, des cassis aux abords des villages contournés par la route bifurquant à angle droit sans avertissement, des travaux de confortement des bas-côtés créant des voies uniques sans régulation de l’alternance de circulation, et des ponts effondrés au-dessus des rivières que l’on contourne par une déviation en terre, des gués ou des ponts de fortune à voie unique…
Paul nous énumère les noms des villages que nous longeons ou traversons : Massacre, Mahaut, qui sont de bons lieux de pêche, Saint Joseph (ou SenJoe), village aux rues étroites, Mero réputé pour sa plage, Salisbury, village sur les hauteurs au-dessus de la mer, lieu de production de tomates ou de maracujas, Dublanc, la plus petite commune où Paul prend plaisir à nous faire passer dans les rues si étroites que l’on circule au pas, surveillant les profonds caniveaux ou les pas de portes des cases où les « mamas » préparent leurs légumes.
La plupart de ces villages sont blottis dans une anse de sable gris, le long d’une rivière, et s’agrippent aux mornes raides qui l’entourent, avec une activité orientée vers la mer et la pêche.
Nous traversons Layou River, la plus grande rivière de l’île sur un pont de fortune, construit après un détour dans les terres pour atteindre des berges stables. Son embouchure est réputée pour ses petits poissons, les « titiwis » préparés en acra.
Durant ce tour en voiture, nous avons pris le temps de visiter la chocolaterie Pointe Baptiste Estate à Calibishie.
Le propriétaire actuel a hérité de ses grands-parents, cette fabrique artisanale. Grâce à ses origines françaises, par sa mère, il nous détaille en français, les étapes de l’élaboration du chocolat, depuis l’arrivée des cabosses jusqu’à la vente de ses tablettes. Les cabosses proviennent pour la plupart de ses cacaoyers ; quand une quantité suffisante de cabosses est récoltée, elles sont ouvertes et les fèves entourées de leur pulpe sont mises à fermenter dans des bacs en bois, tapissés et recouverts de feuilles de bananiers.
Après cette première étape qu’il surveille de très près (car c’est d’elle que dépend la qualité du chocolat, nous dit-il), les fèves sont mises à sécher sur des plateaux aérés, à l’abri de la pluie.
Une fois les fèves ainsi préparées, on procède à la préparation du chocolat proprement dite : les fèves sont concassées, le « son » est séparé du cacao par un procédé d’aspiration ; le cacao est broyé à chaud pendant quatre à cinq jours de manière à être bien lissé ; puis dans une sorte de fontaine, le chocolat est brassé à chaud, plusieurs jours puis refroidi pour obtenir une bonne cristallisation, avant d’être réparti sur des plaquettes pour former les tablettes.
Ces dernières peuvent être nature ou aromatisées : au gingembre, à la cannelle, à la noix muscade, à la citronnelle, au sel, aux éclats de cacao… Ces apports se font à différents moments de la préparation selon ce que l’on veut obtenir : ajout des éclats de cacao en fin de processus pour le craquant, épices en début de processus pour un lissé parfait… Après dégustation, nous avons pu réapprovisionner le bord en chocolat puisque nous avons épuisé le stock de tablettes achetées à Grenade !
Avant de reprendre la voiture, Paul nous a emmenés dans les jardins de la chocolaterie et nous a appris à reconnaître de nombreuses espèces de plantes ou d’arbres : Ylang Ylang pour les parfums, avocats pendus au bout de leurs longues tiges, « Lily Ginger Pink », belles fleurs roses, rouges ou blanches dont les rhizomes sont comme le gingembre, caféier, lavande rose…
Botaniste de formation, Paul nous a désigné tout au long de cette journée, les espèces rencontrées : la citronnelle sur les bas-côté de la route, qui lorsqu’elle était fauchée dégageait sa bonne odeur si caractéristique ; le palmier royal dont l’écorce dure est utilisée pour tailler les « djembés » ; le palmier bouteille, plus petit et plus arrondi ; le palmier rasta ainsi nommé pour ses racines rejoignant le tronc en nombreuses radicelles, faisant penser à une coiffure rasta ; le balsa, qui comme le bambou grandit de plusieurs centimètres par jour ;
le gommier reconnaissable à sa sève blanche, à l’odeur si caractéristique lorsqu’on la gratte ; la petite fougère dont les feuilles déposent une poudre sur la peau faisant comme un tatouage ; la « blue wax flower » dont la corolle est dure comme de la cire, sous les doigts ;
chaque plante est connue pour ses vertus médicinales, et il nous a affirmé que c’est ainsi que se soignent la plupart des Dominiquais. Il a également déploré la prolifération d’une vigne grimpante « Morning Glory » aux grosses fleurs violettes, un peu comme des liserons, ou aux petites grappes de clochettes roses : après le passage de Maria, la disparition de la canopée a favorisé son développement et s’enroulant autour des arbres, elle façonne un paysage surprenant. En attendant que la canopée se reconstitue complètement, l’île a cet aspect « alpin » qui nous a surpris de loin…
La nature est généreuse et Paul a pris plaisir à ramasser pour nous des branches de bois d’Inde (dont les feuilles aromatisent de nombreux plats, un peu comme le laurier), de cannelle (dont les feuilles entrent dans la composition du rhum arrangé), des caramboles, des oranges, de la citronnelle, des « birds of paradise » (fleur de balisier) ; sur de solides tiges, cachées derrière de grandes feuilles, semblables à celles du bananier (ils appartiennent à la même famille), ces « fleurs » sont des coupelles rouge-orange ou jaunes, qui retiennent l’eau pour les oiseaux, et qui cachent la vraie fleur avec ses organes, étamines et pistil.
Cette riche et luxuriante végétation cache ou envahit souvent d’anciennes habitations, dont on ne voit que les ruines : roue à aube du pressoir de canne à sucre, cheminées de la sucrerie… A Springfield Estate, les citronniers, orangers, mandariniers continuent de pousser dans les jardins des maisons individuelles construites sur les terrains de l’ancienne habitation.
Le deuxième temps de découverte sera l’après-midi d’exploration de la Rivière Indienne.
Eddison vient nous chercher dans sa pirogue, et à l’embouchure, coupe son moteur, le remonte et installe ses lourds avirons de bois. S’ensuivent deux heures hors du temps : Eddison rame, en remontant calmement la partie de la rivière que l’on peut visiter, s’arrête et nous raconte la nature qui nous entoure et qui panse ses plaies de Maria : la lande de fougères, le long des rives, puis les hibiscus sauvages aux fleurs jaunes, et les « poiriers » (différents de ceux que nous connaissons) dont le bois dur est utilisé pour la fabrication des barques, les troncs de cocotiers privés de leurs feuilles après Maria, qui attendent de pourrir et de tomber, les cocotiers qui repoussent dans lesquels tout est bon ou utile : le fruit, les fibres, les feuilles (avec lesquelles il nous tressera un pélican et un poisson).
Plus loin, de grands arbres aux racines aux formes surprenantes tiennent les berges parsemées de trous de crabes. Au point limite de la partie visitée, nous déambulons dans un jardin fleuri où Eddison nous vante les vertus des jeunes feuilles de goyavier pour apaiser les troubles digestifs ;
plus loin, une cabane rasta permet de déguster des rhums arrangés ; ici, le choix reste sage, mais dans les petits restaurants, le long des routes, les étagères derrière le bar sont pleines de bouteilles de rhums arrangés, aux noms décalés : « Obama », « Clinton »… ; ils forment ce que l’on appelle la « pharmacie » ! Le deuxième bras de la rivière nous conduit à une case construite sur pilotis, entre les arbres au bord de l’eau ; nous grimpons sur la passerelle et visitons cette antre de sorcière où l’on peut laisser libre cours à son imagination…
La pluie et le mauvais temps s’installent et notre troisième journée de découverte vers Roseau sera marqué par la grisaille et la pluie. Il s’agit pour nous d’aller visiter, toujours sous la conduite de Paul, les flancs sud du Morne Trois Pitons, au-dessus de Roseau. Nous empruntons à nouveau la « highway », faisons une pause à Saint Joseph dans une ruelle en pente pour acheter du jus de canne pressé sur un pas de porte.
Dans les faubourgs de Roseau, nous prenons une route qui s’élève dévoilant entre les nuages, un paysage de vallées profondes et étroites et de falaises volcaniques assez vertigineuses.
Premier arrêt : Titou Gorge : il faut chercher dans la végétation qui entoure une vasque naturelle, la faille qui marque l’entrée des gorges.
On ne les visite qu’en nageant ou marchant dans l’eau, accompagnés d’un guide. Par ce temps gris pluvieux et froid, nous n’avons pas eu le courage de tenter l’expédition… Nous nous contenterons de grimper sur le début du sentier, rendu glissant par la pluie, et qui surplombe ces gorges difficilement repérables au milieu de la végétation.
Outre le caractère impressionnant de cette étroite gorge, nous avons également admiré le travail des hommes qui ont réalisé une conduite forcée amenant l’eau de la vasque jusqu’à une petite centrale électrique en contrebas : cette conduite est en bois calfaté régulièrement cerclé.
En de nombreux endroits, nous croiserons ces petites centrales électriques, proches d’une chute d’eau.
Nous repartons vers Trafalgar Falls ; au-dessus du village, deux chutes d’eau entaillent un immense cirque volcanique : Daddy Fall pour la plus haute et Mummy Fall pour la seconde. Nous n’avons pas su trouver le chemin menant au pied des chutes, au milieu des blocs de rochers humides et glissants, pour aller voir de près le bouillonnement des cascades, et les résurgences d’eau chaude tout autour.
En effet, un peu partout, à côté des rivières fraîches, de petites résurgences d’eau chaude sourdent de terre, reconnaissables à leur couleur ferrugineuse…
Le spectacle reste grandiose entre la hauteur des falaises et des cascades au milieu d’une végétation dense…
En redescendant de Trafalgar, nous arrivons à Wotten Waven, dans un immense point chaud : un vaste cratère arboré, vallonné et en maints endroits des petites sources d’eau chaude et sulfureuse. Nous approchons d’un point d’ébullition et observons le bouillonnement.
Ensuite, nous nous délasserons dans un bain chaud légèrement sulfureux, tandis qu’à côté, la douche fraîche qui descend des hauteurs est vivifiante.
Notre route se poursuit dans l’arrière vallée de Roseau ; les cannes ont donné son nom à la ville et servaient notamment au parement des cases.
Notre aperçu de Roseau a été un peu rapide, car nous avons passé la plupart du temps à l’abri des grains. Dans les rues sur un plan orthonormé à partir du front de mer, nous avons pu remarquer la variété des constructions, l’abandon des habitations détruites par les intempéries, ou l’habileté des Dominiquais à investir les ruines en pierres des bâtiments anciens, comme le « Ruin Bar »…
Grâce à ces deux journées de visite touristique en taxi, nous avons eu un aperçu général de cette île qui recèle une grande quantité de sites naturels à explorer…
La forte tempête annoncée, sévit au nord des Petites Antilles et nous passons trois jours au mouillage à surveiller nos bateaux, car le vent dévale des hauteurs derrière Portsmouth, et les grains se succèdent, usant notre patience. Néanmoins, ce temps perturbé offre des luminosités exceptionnelles, et l’orientation de la baie nous gratifie chaque soir de couchers de soleil exceptionnels. La présence de vieux bâtiments de marine à voile ajoute sa part de mystère à ces fins de journée….
Finalement, le 14 janvier, nous profitons d’une légère accalmie et nous partons à la recherche d’une voiture à louer pour aller explorer la baie de Soufrière à l’extrême sud de l’île. Une commerçante que nous interrogeons, trouve plus simple de nous embarquer tous les cinq dans sa voiture et de nous déposer devant l’agence de location, plutôt que de tenter des explications en français ! Cette serviabilité est déconcertante et néanmoins très agréable…
Une fois les formalités terminées (dont l’achat d’une licence de conduite), nous repartons vers Roseau. Au sud de la ville, la route longe le bord de mer et cela nous permet de prendre des repères sur le mouillage…
Pour atteindre la baie de Soufrière et le village de Scotts Head, tout au sud, la route longe le bord de mer, puis s’élève et contourne un morne qui tombe à pic dans la mer, délimitant ainsi au nord la baie et offrant des perspectives sur le village de Soufrière, son église rose et son cimetière.
On pénètre dans le village par le vallon qui prolonge Soufrière dans les terres, avant de rejoindre le bord de mer pour la dernière portion de route ; celle-ci, bétonnée le long du rivage est soudain interrompue et on rejoint la suite de la route en contournant la partie effondrée dans la mer sur un passage chaotique en terre. Scotts Head est le dernier village au sud, un isthme de galets permet de rejoindre le promontoire et le fort de Cachacrou. De petites maisons colorées, des barques de pêche tirées sur la grève ou au mouillage donnent à ce paysage des allures de bout du monde. La mer plate, d’un bleu profond contraste avec les flots agités et écumants du Canal entre Dominique et Martinique, de l’autre côté de l’isthme.
Nous décidons de poursuivre notre exploration en voiture, en rejoignant la côte sud-est. Après une route tortueuse à travers les mornes abrupts, nous atteignons le littoral à Grand Bay. Ouverte sur l’Atlantique, la côte est battue par les vagues, de nombreux troncs flottés encombrent la plage. Après un moment de route en bord de mer, à Fond Saint Jean, la route grimpe à nouveau dans les mornes : un premier passage en terre, puis passage d’un torrent à gué, à côté du pont effondré,
puis un pont de bois sur un chemin de terre, à nouveau du goudron et enfin nous arrivons devant un grand talus qui barre la route, rendue étroite par la végétation. De l’autre côté de la ravine, nous voyons bien qu’elle se poursuit, mais dans quel état ? de toute façon, nous ne pouvons pas l’atteindre. Marche arrière, demi-tour, nous allégeons la voiture pour repasser le pont de bois, sous le regard amusé des habitants…
Plus loin, nous interrogeons un homme devant son pas de porte : la route est coupée, il faut retourner à Roseau…
Depuis combien de temps cette route est-elle ainsi abandonnée, alors que les cartes (papier ou électronique) l’indiquent toujours, promettant une belle balade le long de la côte Atlantique en direction du nord ?
Nous touchons là de près l’état de La Dominique : même sur la highway, les ponts sont toujours en travaux, menés par des équipes de Chinois ; les panneaux annoncent des travaux de reconstruction post Erica, (2015, et nous sommes en 2020 !) et ce n’est toujours pas terminé… A moins que Maria ait mis à mal les premières reconstructions ? Les équipes chinoises vivent dans un campement dans un vallon de la route principale, et semblent installés durablement, vu l’avancement des travaux… (Même le GPS de la voiture de location était programmé en chinois !)
La météo nous permet, après sept jours sur bouée à Portsmouth, de reprendre la mer. Forts de notre exploration de la veille, nous décidons d’aller mouiller à Roseau, laissant ainsi le temps à la houle de se tasser un peu dans le canal vers La Martinique.
Le vent souffle encore fort dans Prince Ruppert Bay, nous amenant rapidement, à la Pointe Ronde au sud.
S’ensuit une navigation toute en réglages, puisque le vent ne cesse de varier : du nord-est au sud-ouest pour un court moment, avant de revenir d’est, mais variant brusquement d’intensité en raison du relief de la côte. Mais cela fait du bien de retrouver les sensations de la navigation !
Arrivés au sud de Roseau, nous appelons sur la VHF les « boatboys » de « Sea Cats services » qui viennent rapidement nous aider à prendre une bouée. Nous sommes bien installés par treize mètres de fond et le mouillage n’est pas rouleur. Nous ne sommes pas très loin des ruines de l’hôtel Anchorage qui auparavant proposait ce service de mouillages. La relève est assurée !
Le lendemain, jeudi 16 janvier, nous appareillons au lever du jour, pour rallier La Martinique. Pour éviter les désagréments des vents tournants, ou tombant des mornes, nous parcourons la distance jusqu’à Scotts Head Point au moteur, regardant cette côte dans les lueurs du contre-jour matinal.
Une fois dans le canal, la mer et le vent sont bien établis et nous pouvons poursuivre notre descente à la voile, arisés passant bien la houle au travers ou au près bon plein. Après avoir à nouveau joué avec les vents changeants le long de la côte martiniquaise, nous mouillons en début d’après-midi à Grande Anse d’Arlet.
Une nouvelle journée de navigation qui « dégourdit » bien bateau et équipage après cette belle pause en Dominique !
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