Traversée Canaries - Cap Vert

Traversée Canaries - Cap Vert

Posté par : Francine
09 Novembre 2017 à 20h
Dernière mise à jour 13 Novembre 2017 à 20h
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Traversée des îles Canaries aux îles du Cap Vert.

Le 2 novembre après avoir téléchargé les derniers fichiers grib actualisés, fait le plein de gasoil, nous quittons la marina à 11 heures. Un petit vent de nord-est souffle et nous pousse sous gennaker pendant deux heures, pas bien vite. A 13 heures les voiles battent dans tous les sens et nous décidons de mettre le moteur pour maximum une trentaine d’heures. Les fichiers gribs annoncent un renforcement du vent au sud des Canaries demain dans la soirée. Nous parcourons donc les premières dizaines de miles de la traversée au moteur à bas régime, pour ne pas trop consommer et ne pas en avoir plein la tête.

      

Au revoir Les Canaries : La Palma s’éloigne, la lune se lève sur La Gomera et au loin on aperçoit le Teide de Tenerife, et nous sommes déjà en vue de El Hierro que nous allons contourner par l’ouest la nuit.

Une partie de la journée se passe en communications avec les copains tant que nous sommes encore à portée de réseau, après ce sera plus compliqué, car nous ne pourrons plus utiliser nos forfaits européens, il faudra s’organiser. La vie s’organise à bord, économies d’eau, vaisselle et toilette à l’eau de mer, rinçage à l’eau douce. La nuit sera paisible et claire. En effet nous bénéficions d’un merveilleux clair de lune qui nous accompagne du coucher au lever du soleil et qui miroite sur la mer toute la nuit.

Notre amie la lune

La journée du 3 novembre se passe au ronron du moteur, toilette matinale dans la jupe avec un bidon d’eau douce et la pompe qui l’accompagne, lecture, c’est un peu monotone. A midi, premier envoi de nouvelles à Xavier par satellite. A 18 heures il semble qu’il y ait une risée, nous arrêtons le moteur et envoyons le génois tangonné en ciseaux avec la grand- voile. Nous avançons laborieusement ente 3 et 4 nœuds, mais c’est stable et nous soufflons un peu. Une autre nuit paisible sans bruit de moteur et un petit vent qui nous pousse bien. Presque sans moteur ! Philippe annonce que les batteries ne tiennent pas donc vers 3 heures et vers 6 heures nous faisons tourner le moteur une demi-heure… C’est gai ! Les levers et couchers de soleil ne nous déçoivent pas. En ce moment sous ces latitudes, nous sommes à l’heure TU, le soleil se couche à 18h30 et se lève à 7h30. De ce fait avec l’aube et le crépuscule, la nuit et le jour durent à peu près 12 heures.

On ne s’en lasse pas de ces couchers de soleil !

La journée du 4 novembre se passe sous gennaker, pas très stable avec ce vent d’à peine 10 nœuds et plein arrière, mais nous avançons entre 4 et 5 nœuds. Une belle journée avec de jolis petits cumulus de beau temps tout autour de nous et personne à l’horizon.

Pour meubler un peu, le train-train des traversées, je vais parler des Cucarachas (les blattes). C’est une plaie aux Canaries et de façon générale sous les latitudes, elles ont vite fait de coloniser un bateau et c’est très difficile de s’en débarrasser. Nous en étions conscients, et faisions déjà attention. Mais sur les conseils d’un français du ponton de La Palma  et suite à la découverte d’une ou deux de ces charmantes bestioles sur le bateau et  nous avons dû adopter des mesures drastiques. Elimination de tous les cartons d’emballage de la nourriture qui rentre à bord, ce que nous faisions déjà. Emballage des produits secs (pâtes, farines, sucres, paquets de gâteaux entamés…) sous plastique, c’est déjà en place à bord surtout pour  lutter contre l’humidité… l’habitude de naviguer en Bretagne ! Nettoyage à l’eau salée (eau de mer 15 min, ça tue les oeufs), puis rinçage à l’eau douce, des boites de conserves, des fruits et légumes frais achetés sous ces latitudes, j’ai donc fait un nettoyage de tout ce que j’avais à bord et j’en ai profité pour dépoussiérer et désinfecter les équipets de rangement, moins il traîne de miettes, moins elles seront attirées. Enlever ses chaussures qui servent à aller en ville, et ne les monter à bord qu’une fois nettoyées à l’eau javellisée ou salée, ceci afin de ne pas ramener d’œufs. Et enfin achat de pièges et d’un gel qui ne sera utilisé sur les trajets empruntés par ces sales bestioles que si on en rencontre encore. Ces mesures seront appliquées pendant tout notre séjour sous les Tropiques. C’est contraignant mais, nous espérons que cela suffira à contenir une invasion.

Dans la nuit du 04 au 05 novembre, nous essuyons notre premier grain tropical, une bonne pluie qui rince le bateau, le vent se lève modérément nous obligeant quand même à prendre un ris à trois heures du matin. La mer c’est levée aussi et nous passons la journée et la nuit du 06 novembre attachés car ça bouge dans tous les sens ! Ce qui ne nous empêche pas de vaquer à nos occupations, assez restreintes il faut le dire.

Voici comment se déroulent 24 heures en mer. A minuit Philippe va se coucher et me réveille pour prendre mon quart. Selon, le temps et le besoin de surveillance, je lis sur ma liseuse, joue à des jeux sur la tablette ou regarde un film. A 3 heures changement de quart, je vais me coucher, Philippe a ls mêmes occupations pendant sa veille. A 6 heures nouveau changement, là je commence par me faire un petit café regarde ensuite le soleil se lever et vers 8h30, je prépare le petit déjeuner, et si Philippe se réveille à l’odeur du pain grillé nous déjeunons ensemble. Je refais un petit somme, Philippe fait la vaisselle. Vers 10 heures toilette de l’équipage dans la jupe ou le cockpit selon le temps. Ensuite lecture ou autres. Vers midi c ‘est l’heure d’allumer le téléphone satellite et l’ordinateur pour envoyer notre position quotidienne. Ensuite nous nous préparons une petite salade pour le repas, vaisselle, petit café et l’après-midi se passe en siestes, lectures, jeux, rédaction du blog. Je vous rassure, entre deux occupations, nous réglons les voiles et faisons le point ; c’est la moindre des choses ! Vers 18 heures nous commençons à regarder le soleil se coucher, à penser au repas du soir qui est chaud en général (hier risotto aux champignons et rôti de porc froid). Nous le prenons dans le cockpit à la lueur d’un lampe car il fait nuit. Vers 20 heures vaisselle, et en général, je vais me coucher et bouquine jusqu’à 21 heures pendant que Philippe commence son quart avec une heure d’avance.

    

Notre salle de bain extérieure (avec vue imprenable 360° sur la mer !) - Une journée monotone au moteur

   

Le diner du soir, à l’est la lune s’est levée et à l’ouest la lueur crépusculaire décroit

Nous avons passé le tropique du cancer vers 10 heures, le 05 novembre, et nous apercevons nos premiers poissons volants ... enfin Philipe aperçoit, moi je ne vois encore rien ! Il ne fait pas encore trop chaud, 25 degrés dans la journée et 20 degrés la nuit, une sensation de fraîcheur qui nous oblige à nous habiller de pantalons et pulls la nuit.

Maintenant nous sommes sûrs que les batteries ne tiennent plus la charge. La nuit nous coupons le réfrigérateur, le traceur est allumé toutes les 3 heures pour faire le point. Si nous voyons que la tension descend trop bas nous mettons une demi-heure le moteur une ou deux fois dans la nuit et parfois la journée si le pilote fonctionne. C’est quand même rageant d’en revenir à la méthode de grand-papa avec  les moyens que nous avons maintenant !

Le régulateur d’allure Hydrovane surnommé Vany (par Francine dans un élan taxonomique typiquement féminin !), se comporte très bien, heureusement car avec les batteries, c’est un peu problématique de mettre le pilote électrohydraulique. Il nous a pilotés sous gennaker, puis ensuite les deux jours et la nuit sans problème malgré les vagues. Il faut juste bien bloquer le safran, avec des bouts car le frein de barre ne suffit pas avec les vagues qui claquent sur la jupe. Nous allons réfléchir à un système de blocage de barre qui se largue rapidement, ce serait quand même plus sécuritaire.

Le 06 novembre, le vent se calme dans la journée mais la mer reste formée, et nous nous retrouvons plein vent arrière les  voiles en ciseaux avec le génois tangonné et là, Vany a un peu de mal à nous maintenir au cap sans empannage, le vent est trop faible par rapport à la mer et nous avons recourt au pilote électrohydraulique. Nous avançons laborieusement à 4 noeuds, il faudrait avancer un peu plus vite si nous voulons arriver de jour après-demain.

   

Une nuit tranquille, la mer c’est calmée et Vany a très bien fonctionné les  voiles en ciseaux le génois tangonné.

La journée du 07 novembre, nous commençons la journée par un empannage en inversant grand-voile et tangon, pour pouvoir rectifier le cap. Philippe doit faire un peu d’alpinisme pour aller remettre l’axe d’un des coulisseaux de grand-voile qui voulait sortir, surement sous l’effet des à-coups de la grand-voile : peu de vent pour la gonfler et des vagues qui la ballotent dans tous les sens ! Du coup nous avons mis en place un amortisseur sur le frein de bôme pour amoindrir ces à-coups, ça améliore un peu les choses. Nous voyons de plus en plus de poissons volants en bancs (même moi je les vois !), il en a même un qui atterrit dans le cockpit. Vers 16 heures après avoir tenté pendant deux heures de faire gonfler le gennaker pour gagner laborieusement ½ noeuds nous nous décidons à mette un peu le moteur pour avancer un peu. Mais pas trop vite, car nous voulons arriver de jour au Cap Vert. Nous sommes à 170 miles et calculons qu’à 4 - 4.5 noeuds nous devrions arriver au petit matin du 09 (nous avons abandonné l’idée d’arriver le 08), ce qui nous laisse le temps de traîner encore car les nuits et la journée prochaines s’annoncent calmes.

       

La nuit est fatigante, le vent est tombé, les voiles et la bôme claquent. A minuit nous craquons, remballons le génois et le tangon, bordons la grand-voile et mettons le moteur, c’est bon pour nos batteries. Cela n’empêche pas la rupture de l‘attache de la bôme sur le mat à 3 heures du matin, les rivets pops corrodés ont lâché. Nous affalons la grand-voile, ficelons tout cela  de façon à ce que ça ne bouge pas trop, et finissons la nuit au moteur.

Au matin du 08 novembre, le vent se relève un peu et nous pouvons envoyer le gennaker qui va nous tirer à 4 nœuds toute la journée de façon suffisamment stable, sans grand-voile il porte mieux.

Ces oiseaux nous ont accompagnés toute la traversée, ils deviennent plus nombreux en approchant des îles, des pétrels ?

Après une nuit moitié voile, moitié moteur, nous arrivons tranquillement au lever du jour du 09 novembre dans la Baie de la Palmeria à Sal, l’île la plus au nord-est de l’archipel du Cap Vert.

Lever de soleil sur Sal

   

Le drapeau de courtoisie capverdien flotte sur Free Vikings

Bilan de cette, finalement première, grande traversée pour l’équipage. Philippe, qui est capable de dormir n’importe où et qui peut rester de heures à lire ou "méditer" a très bien supporté comme on pouvait s’y attendre. Quant à moi, je savais que j’allais m’adapter. J’étais un peu inquiète car après notre départ sur les chapeaux de roue (si on peut dire !) et notre descente de l’Espagne contre vents et marées, j’avais mal partout et les premières nuits en mer furent alors difficiles. Mais là comme prévu au bout de trois nuits, j’ai dormi comme un bébé et ai pris le rythme, sans trop manquer de sommeil et surtout sans ces insupportables douleurs musculaires. Nous sommes bien sur notre bateau qui malgré les petits ennuis que nous avons, continue à montrer un très bon comportement en mer et mérite toute notre confiance.

Aller un petit dernier pour la route !

 

 

 

 

Emplacement

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